L’économie frugale pour la relance de l’Afrique Post-Covid 19

MAROC IMPACT, association citoyenne Bottom Up œuvrant pour structurer l’écosystème de
l’innovation sociale au service de l’intérêt général et du bien commun, a organisé le 12 juin 2020 un web act sous le thème « L’innovation frugale pour l’Afrique de demain. » Source: industries.ma

Cette rencontre tenue avec le soutien et la participation de Mme Nadia Fettah Alaoui, Ministre du Tourisme, de l’Artisanat, du Transport aérien et de l’Economie Sociale et solidaire et animée par Mme Ghizlaine El Manjra, Présidente de Maroc Impact, a réuni des experts marocains et africains spécialisés en économie sociale et en innovation frugale. Il s’agit de M. Félix Mézian Anoblé , Ministre de la Promotion des PME au Côte d’Ivoire ; M. Navi Radjou , chercheur, essayiste et conseiller en innovation et leadership à New York, membre de la Judge Business School de l’Université de Cambridge ; Mme Aawatif Hayar, Présidente de l’Université Hassan II de Casablanca et experte internationale des Smart Cities et M. Karim Sy, Fondateur de Jokkolabs, premier espace de travail collaboratif en Afrique de l’Ouest et incubateur de start-up à fort impact social, auparavant membre du Conseil présidentiel pour l’Afrique installé par Emmanuel Macron à l’Elysée.

Intervenant en ouverture de ce web-act, Mme Nadia Fettah Alaoui a mis le point sur l’importance de l’économie sociale et solidaire pour limiter les précarités et créer de la richesse surtout dans le monde rural, dont les habitants sont particulièrement impactés par la crise. Au Maroc, on compte 160.000 associations et 27.000 coopératives avec plus de 150.000 adhérents, ce qui montre que réellement la notion de l’économie sociale et solidaire se développe de plus en plus. « Chaque association et/ou coopérative regroupe des personnes ayant le même objectif, appartenant au même territoire et collaborent ensemble pour créer un circuit court entre le consommateur et le producteur. C’est donc une intelligence collective qui règne, cette intelligence collective doit être pensée à l’échelle du continent africain à travers une coopération sud-sud», déclare la ministre.

Le contexte de la crise économique due à la pandémie de la Covid19 a poussé à bout les anciens modèles économiques et a mis à l’épreuve les gouvernements à travers le monde. Rappelons que l’Afrique a fait preuve de résilience et de leadership dans sa réponse à la crise du Covid-19, le continent a agi rapidement et a été proactif, en adoptant des mesures préventives en amont, tout en trouvant un équilibre, entre protéger les vies, atténuer les effets économiques et continuer à éradiquer la propagation de la pandémie Covid-19. Ce choc externe imprévu s’est imposé aux économies de l’Afrique, bouleversant l’offre et la demande. Le pari économique et social est l’enjeu principal dans un contexte de prémices d’une récession économique mondiale et inévitable, pour le Maroc, au cours des deux mois d’état d’urgence sanitaire, l’économie marocaine a perdu 1 milliard de dirhams par jour, ce
qui correspond à 6 points de la croissance de son PIB. L’Union Africaine a évalué à 20 millions le nombre d’emplois disparus en quelques mois.

Dans un tel contexte, l’innovation frugale s’avère être un impératif à la relance économique et au développement social dans le continent. Cette démarche qui consiste à répondre à besoin de manière simple et avec un minimum de ressources est présentée par M. Navi Radjou, comme la meilleure solution pour gérer l’après-crise. Il a ainsi énuméré quatre bonnes pratiques de la frugalité, à savoir : utiliser ce qui est abondant pour créer ce qui est rare; éviter le complexe de “pharaon” et aller à la rencontre du consommateur là où il est sans forcément lui proposer un produit cher ; faire de la recherche scientifique avec peu de moyens ; miser sur l’intelligence collective pour mieux avancer.

M. Navi affirme que le continent est pionnier dans l’innovation frugale surtout pendant la crise du Covid19. Il cite pour exemple l’institut Pasteur du Sénégal qui a pu créer un kit de dépistage du coronavirus à 1 euro seulement. Pour y arriver il faut trois piliers :
– Le partage des ressources inter-entreprises que ce soit les ressources tangibles ou intangibles ;
– La production décentralisée c’est-à-dire qu’il faut produire au plus près de la consommation à travers des micro-usines, ce qui va créer des emplois massivement.
– La régénération à travers le recyclage par exemple, et donc arriver à créer le label “Re-made in Africa”.

De son côté, Mme Aawatif Hayar, a expliqué dans son exposé le concept de la ville intelligente frugale et sociale qui a réussi grâce à deux aspects : le capital humain composé de jeunes assoiffés de réussite et la technologie omniprésente qui ne coûte pas cher. Le digital est donc, l’outil par excellence qui permettra d’innover en plus d’un capital humain bien formé. Ces deux composantes ont fait leur preuve au Maroc dans le domaine de l’enseignement. Dans ce sens, Mme Hayar a cité l’exemple de l’Université Hassan II qui a fait preuve de frugalité compte tenu de ses ressources disponibles, en vue d’assurer la continuité académique dans un contexte de crise, marqué par son passage de l’enseignement présentiel à l’enseignement en ligne, qui a donné lieu à la numérisation de milliers de documents en 2 mois et à la mise en place d’une plateforme professionnelle de cours en ligne pour les étudiants.

C’est justement la notion d’intelligence collective qui représente pour M. Karim Sy, la voie du futur. « Dans chaque crise il y a des opportunités et cette pandémie a été l’occasion pour l’Afrique de se redécouvrir, d’innover, de se faire confiance et de faire confiance à sa jeunesse. Les africains ont naturellement cette approche d’impact social, elle est presque innée. Aujourd’hui les nouvelles technologies et le digital en particulier permettent au continent de s’ouvrir sur le monde et de se réinventer », dit-il.

Pour le Ministre ivoirien de la promotion de la PME, M. Félix Mezian Anoblé, il est essentiel de capitaliser sur les ressources dont dispose le continent et de les faire revivre, notamment en orientant les jeunes vers l’entrepreneuriat et en créant des écosystèmes et des chaines de valeur qui permettront de développer et d’enrichir les différents secteurs d’activité en Afrique.

Versant dans le même sens, la présidente de Maroc Impact, Mme Ghizlaine El Manjra, a rappelé que l’essaimage de la culture de l’innovation frugale et son adoption par le secteur public et privé doivent se renforcer pour devenir un des piliers de la croissance économique et l’un des éléments de réponse pour contribuer à un choc économique régénératif. « En cette période d’incertitude, l’expérimentation et l’opérationnalisation de solutions concrètes disruptives, des alliances coordonnées d’idées et de valeurs communes centrées sur l’innovation frugale sont impératives pour déployer des alliances d’actions à massification socio-économiques », note-t-elle.

En conclusion, et pour prouver qu’une dynamique frugale est déjà en marche au Maroc, Mme El Manjra a annoncé en avant première le lancement de la nouvelle plateforme Muhub.africa et a annoncé la date de septembre prochain pour la tenue du prochain « Web Act For Impact » pour annoncer de nouveaux projets et de nouvelles réalisations.

Il est à noter que Maroc Impact a mené plusieurs actions au cours de cette crise sanitaire COVID-19 , dont le lancement de l’initiative SAC « Solidaires avec les coopératives » en partenariat avec la Fondation SMarT , et aussi le déploiement de la plateforme « MUHUB.ma » en partenariat avec le Société Générale Maroc et l’Université Hassan II de Casablanca. Cette plateforme à impact social et économique a pour objectif de favoriser l’émergence et l’accélération de projets liés à la gestion de la crise Covid-19.

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