Avenue des grands hommes: diplomate, soufi, patriote, Chams Eddine Ndoye il s’appelait…

Vendredi 22 août 2025 dernier, le Sénégal perdait un de ses plus illustres fils en la personne de l’Ambassadeur Mohamed Chams Eddine Ndoye. Issue d’une des grandes plus grandes familles religieuses du Sénégal, diplomate chevronné, il a grandement contribué à construire et à consolider les relations entre le Sénégal et le monde arabe où il a passé l’essentiel de sa carrière. Source: Texte paru dans Le quotidien le Soleil signé de ses « enfants ».

Si le Sénégal à une politique arabe solide, il le doit à des hommes comme Chams Eddine Ndoye. Fils du notable lébou et muxadam d’El Hadj Malick Sy, Amadou Assane Ndoye et de Oumou Khaïry Sy fille de El Hadj Malick Sy, Chams Eddine Ndoye a de qui tenir. Sa sainte mère, première femme à créer une école coranique à Dakar est non seulement la fille de Maodo mais aussi de Soxna Yacine Dieng, fille de Mor Massamba Diery Dieng, dignitaire et érrudit établit à Saint-Louis, dont la maison était le creuset des rencontres religieuses les plus intenses de l’île dans le quartier Lodo.

C’est dans cet environnement que vient au monde Chams Eddine Ndoye en 1935 dans la demeure Saint-Louisienne de son grand-père maternel, Seydil El Hadj Malick Sy. Il grandit à Dakar-Plateau auprès de son père, Amadou Assane Ndoye.

Le jeune Chams Eddine Ndoye, comme tout bon enfant issue des familles religieuses, intègre très tôt l’école coranique. Il maîtrisa  le Coran avant l’âge de dix ans. Orphelin de mère à 16 ans, il fut pris en charge par son père, ses oncles maternels — Serigne Babacar Sy et Mame Abdoul Aziz Sy Dabakh, futurs Khalifes généraux des Tidianes — ainsi que par Serigne Hady Touré, qui compléta sa formation religieuse. Entouré par ces orfèvres de la langue arabe et chantres du bon comportement, Chams Eddine Ndoye était déjà à bonne école pour être un futur diplomate.

Ses études le conduiront à l’Université du Caire (en Égypte), où il sera diplômé en sociologie. Amoureux de la connaissance, Chams Eddine Ndoye veut poursuivre ses études et entend faire de la recherche. C’est ainsi qu’il dépose un dossier à l’IFAN. Le président Léopold Sédar Senghor découvre son dossier et l’encouragea à se lancer plutôt dans la diplomatie.

« À une époque où le Sénégal nouvellement indépendant comptait très peu d’universitaires, et encore moins de spécialistes du monde arabe maîtrisant à la fois le français et l’arabe, les candidatures des diplômés supérieurs étaient souvent transmises à la Présidence » renseigne un article-hommage paru dans Le Soleil signé des enfants de l’illustre disparu.

Il faut dire que le président Senghor conscient des enjeux géopolitiques, veut doter le Sénégal d’une diplomatie de haut vol afin que son pays nouvellement indépendant, petit par la taille et nain économique puisse tirer son épingle du jeu dans la marche du monde.Birago Diop, Cheikh Hamidou Kane, Cheikh Tidiane Sy Al Maktum, entre autres, feront rayonner la diplomatie sénégalaise.

Le profil de Chams Eddine Ndoye, enfant de bonne famille et à la formation impeccable, semblait idéal pour le poète président.

Chams Eddine Ndoye commence sa carrière de diplomate au ministère des Affaires étrangères au début des années 1970 comme conseiller diplomatique. Il gravit rapidement les échelons et devint chef de la division Moyen-Orient avec Amadou Karim Gaye comme chef de la diplomatie. En 1972, il fut nommé Premier conseiller à l’Ambassade du Sénégal en Arabie Saoudite, devenant peu après chef de mission par intérim, suite au départ de l’Ambassadeur Ahmed Diop.

C’est ainsi que Chams Eddine Ndoye participa aux réunions fondatrices de l’Organisation de la Conférence Islamique (OCI), et apporta aux débats une contribution substantielle. La délégation sénégalaise, conduite par Amadou Karim Gaye, fut parmi celles qui défendirent avec conviction la légitimité de l’organisation face à ses détracteurs.

En 1976, le Président Senghor le nomma Ambassadeur en Syrie, également accrédité au Liban et en Jordanie. Le Sénégal venait à peine d’ouvrir une ambassade à Damas, considérée par Senghor comme « l’un des meilleurs observatoires sur le conflit israélo-arabe ». Dès la présentation de ses lettres de créance, Chams Eddine Ndoye fut remarqué par le président syrien Hafez El Assad, impressionné par sa maîtrise de la langue et de la culture arabes.

Grâce à sa connaissance profonde de la sociologie du monde arabe, son action contribua au renforcement des relations entre le Sénégal, la Syrie et l’Irak. En 1978, il retourna en Arabie Saoudite comme Ambassadeur, accrédité également en Jordanie, au Bahreïn, à Oman et aux Émirats Arabes Unis. En 1981, le Président Abdou Diouf le nomma Ambassadeur au Koweït, accrédité aussi à Bahreïn et au Liban, où il sut restaurer des relations bilatérales fragilisées.

En 1983, il devint Ambassadeur en République Arabe d’Égypte, en même temps accrédité au Soudan et à la Syrie. L’Égypte fut le pays où il servit le plus longtemps, treize années durant, occupant même les fonctions de doyen du corps diplomatique africain et vice-doyen du corps diplomatique. Au Caire, il représenta le Sénégal auprès de la BADEA et œuvra à obtenir des financements pour de nombreux projets sénégalais.

Tout au long de sa carrière, l’Ambassadeur Chams Eddine Ndoye défendit les intérêts de son pays avec fermeté, courtoisie et intelligence. Partout où il passa, il laissa une image d’homme respecté, apprécié tant par les autorités gouvernementales que par ses pairs ambassadeurs. Son souci constant d’assistance aux Sénégalais établis dans les pays arabes fut également salué. Il œuvra notamment à fédérer les étudiants sénégalais d’Égypte et n’hésitait pas à visiter des compatriotes détenus dans les prisons locales pour s’assurer de leurs conditions de vie.

Après plus de vingt ans de service, il rentra au Sénégal en 1996, élevé au rang d’Ambassadeur honoraire. Cette distinction, ainsi que les nombreuses autres qu’il reçut, illustrent le parcours d’un homme intègre et pétri de valeurs.

Mais Mohamed Chams Eddine Ndoye n’était pas seulement diplomate. Il était aussi un soufi et un guide religieux doté d’un grand savoir en sciences islamiques.

L’Ambassadeur Mohamed Chams Eddine Ndoye s’est retiré paisiblement le 22 août dernier après une vie riche, palpitante au service de son pays et de l’humanité. Il laisse l’image d’un homme pieux, humble, discret, digne, généreux et animé d’un grand attachement aux valeurs de paix et de concorde. Chams Eddine Ndoye était un homme d’honneur comme on en voit plus beaucoup.

Qu’Allah le Tout-Puissant, en ce mois béni du Mawlid, lui accorde Sa Miséricorde et l’accueille dans Son Éternel Paradis.

 

 

 

 

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