« Essamay: Bocandé la panthère », le biopic de la légende du football

Dans l’histoire des grandes stars, il y a quelque fois, une part de dramaturgie. Lorsqu’un soir de finale de Coupe du Sénégal en 1980, Jules Bocandé, sociétaire du Casa Sport qui fasait face à la Jeanne d’Arc, agressa l’arbitre qu’il juge partisan, personne ne savait qu’à cet instant, il était entrain d’écrire sa légende. Il sera suspendu à vie. La suite, il l’écrira en Europe. Metz, PSG, Nice, Lens mais aussi et surtout avec les Lions dont il devient la tête de gondole. En lui dédiant le biopic « Essamay : Bocandé la panthère » Maky Madiba Sylla et Lionel Bourqui réparent une anomalie en même temps qu’ils rendent hommage à un patrimoine.

« Essamay: Bocandé la panthère », le biopic de la légende du football, Information Afrique Kirinapost

Un jour, dans la cour de notre école, le Collège de la Cathédrale, un attroupement. Un petit garçon est l’objet de toutes les attentions. Qui est-ce ? Tout de suite, comme une traînée de poudre, l’équation est réglée. Le fils de Bocandé vient de s’inscrire à la Cathédrale disent certains, quand d’autres soufflent que c’est son neveu. Éric, est tout jeune mais attire toutes les convoitises. Il est l’enfant de la personnalité sportive la plus adulée du pays. Nous transférions alors toute l’admiration que nous portions au père sur le fils…Bocandé était notre héros !

Le théâtre de verdure de l’institut français s’est avéré trop petit le 11 Janvier dernier pour contenir le public venu regarder l’avant-première de « Essamay : Bocandé la panthère ».

Nous le devons à Jules Bocandé. Le peuple sénégalais se doit de lui être éternellement reconnaissant. Au-delà de ce devoir, qui a amené du beau monde à l’institut, le public a découvert un film émouvant, bien documenté et au casting on ne peut mieuxcibler. Oumar Gueye Sene ancien coéquipier au Paris Saint-Germain, Amadou Diop « Boy bandit » capitaine de la légendaire équipe des Lions au Caire, Carlo Molinari président historique du FC Metz, Luc Sonor coéquipier à Metz, Mamadou Koumé ancien président de l’Association Nationale de la Presse Sportive (ANPS), Abdou Latif Diop journaliste et biographe de Bocandé, Abdoulaye Diaw la légende du reportage sportif, Gildo Foda son premier entraîneur à Tournai (Belgique) rien que ceux-là. Le film fait découvrir ou fait redécouvrir au Sénégal son Jules.

La relation amoureuse entre Bocandé et le Sénégal débuta vraiment le 1er septembre 1985. Les Lions de la Teranga restés 17 ans sans aller en phase finale de coupe d’Afrique, accueillent le Zimbawe en match retour des qualifications pour la CAN 1986. Le Sénégal avait perdu la manche aller par un but à zéro. Cet après-midi là, dans stade Demba Diop ultra rempli, le Sénégal renverse la tendance et gagne par 3 buts à zéro. Bocandé en fut le grand artisan en inscrivant un triplé.

Le film-documentaire, retrace tout ce beau parcours du meilleur avant-centre de l’histoire du football sénégalais en donnant la parole à sa famille, ses amis, ses dirigeants mais aussi aux journalistes sportifs.

Sadio Mané avec ses nombreux titres individuels et sa victoire à la CAN a marqué de façon éternelle le sport sénégalais, c’est une évidence. Dans quelques années, un film-documentaire rendra sûrement hommage à sa carrière magistrale mais dépassera-t-il, malgré tout Bocandé ? Au niveau des titres sûrement, mais dans l’imaginaire collectif…peut-être pas. C’est ce qu’on ressent après avoir regardé « Essamay : Bocandé la panthère ».

Jules Bocandé, en plus d’être bon footballeur, est un personnage. Il a de la gueule. Ses dreadlocks, qui inspirèrent toute une génération, -Aliou Cissé l’actuel sélectionneur notamment- son franc-parler, sa générosité et son courage y sont pour quelque chose. Il faisait rêver. C’était une Rockstar.

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Le fameux match Senegal Zimbawe de 1985

Agacer l’arbitre tout le long d’un match pour prendre un carton rouge lui permettant d’aller rejoindre son équipe nationale lorsque son club, ne voulu pas le libérer, c’était sa Bocandé. Donner sans compter, conseiller et soutenir ses proches comme l’a souligné le journaliste Pape Sané, avoir du temps pour les petites gens et badauds, malgré son statut, c’était cela aussi Bocandé.

Aliou Cissé, l’a répété tout le long du film : « La star c’est Bocandé ». Après sa carrière de joueur, il devint brièvement sélectionneur avant qu’El Hadj Malick Sy Souris, légende du football et président de la fédération, conscient de l’impact d’Essamay sur la génération d’après, l’invita, un peu plus tard, à intégrer le staff des Lions. Pour le grand bien du football national.

Naturellement, partout où il est passé, il a laissé un souvenir impérissable, mis à part son passage à Paris. Il a ramené le Sénégal en CAN après une disette de plus de quinze ans. Il a été meilleur buteur du championnat de France avec Metz. Il a été brillant à Nice puis à Lens. Sans oublier qu’il sauva le club de Seraing de la relégation et de la faillite grâce à ses performances.Tant et si bien que les infrastructures de l’Académie des jeunes de Seraing portent désormais le nom de Jules François Bocandé et le FC Metz dans sa session de plantation d’arbres a Frescaty immortalisant les grandes fifures qui ont marqué le club a planté l’arbre Essamay en novembre dernier.

Sénégalais au plus profond de son être, Casaçais fier de ses racines, Bocandé a toujours été celui qui nous rappelle que le Sénégal est un. Son apport dans la consolidation de la paix et de l’unité nationale pouvait d’ailleurs être mieux mis en évidence dans le film. Mais ce que Maky Sylla a fait est déjà tellement énorme…

Le 7 mai 2012, Essamay disparaissait à Metz où il se soignait. Frappé par un AVC, il trouva assistance auprès de son papa le président Molinari et auprès de ses amis dont Luc Sonor à qui il confia, sur les gradins du stade Saint-Symphorien, quelques jours avant son décès : » Boy, Je crois que je vais partir ». Des propos qui avaient, sur le coup, secoué l’ancien international français.

Il est parti de manière si soudaine, que ce départ participe à la légende. Partir pour mieux rester dans le cœur des Sénégalais et des fans de foot.

Le film raconte toutes ces épisodes de la vie de Bocandé de façon poignante. Ses succès, ses échecs comme la CAN jamais remportée, mais pour laquelle, il a posé tant de jalons importants avant que n’arrive sur le toit de l’Afrique la bande à Cissé. Oui, il a fallu des Cheikh Thioune, Matar Niang, Louis Camara, Bouba Diakhao, Abdoulaye Diop Pelé, Cheikh Seck, Badou Gaye, Ndoffene Fall, Christophe Sagna, Cheikh Sarr, Baba Touré, Victor Diagne, El Hadj Diouf, entre autres- autant de personnalités qui mériteraient un Biopic- et bien évidemment Bocandé, pour que Sadio Mané puisse soulever le trophée continental. C’est dire, si Maky Madiba Sylla a fait un travail de mémoire d’une portée insondable, dans ce contexte si difficile où la préservation du patrimoine semble être une rêverie.

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Bocandé sous le maillot messin

 

 

©Pape Ba Gahn

 

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