Victimes aujourd’hui d’une « épuration » russophobe culturelle voire historique, les grands resteront grands malgré tout. À relever la vague similitude avec l’initiative de Hitler en 1933, « action contre les esprits non-allemands » qui avait permis de brûler publiquement des dizaines de milliers de livres d’écrivains juifs, marxistes et pacifistes.
La propagande autour de la guerre en Ukraine en cours, montre par certains de ses excès sa volonté de provoquer et de jouer dans le champ émotionnel. Elle étale ainsi les limites, déjà volatiles, comme pour toute propagande, de sa légitimité.
L’existence actuelle de penchants et d’activités de groupes néo-nazis en Ukraine renforce encore le trouble quant à une russophobie généralisée. Cette censure culturelle s’enracine plus loin qu’on ne le pense. Ces grandes figures de la culture russe glorifient dans certaines de leurs oeuvres la victoire de la Russie sur la France en 1812, où l’armée et les populations russes avait causé la défaite de Napoléon 1er en (Russie). Tout comme l’une des grandes motivations du régime nazi a été de venger la défaite de l’Allemagne à l’issue de la 1ère guerre mondiale.
À vrai dire l’Histoire des relations entre la Russie et l’Europe déroule une longue succession de « je t’aime moi non plus ». Sous d’autres cieux, en matière de propagande – coloniale -, dont l’impact local se prolonge hors du contexte de son avènement jusqu’à l’époque d’aujourd’hui officiellement révolue, la statue du Général Leclerc, provoquante pour bon nombre de Camerounais, trône au quartier administratif de Douala. Héros militaire de l’Empire colonial français, la statue est restée indéboulonnable grâce au zèle de la répression du régime Biya.
Pour rappel, dès 1940 grâce à Leclerc, le Cameroun s’était rallié à l’effort de guerre français en Afrique et en Europe, permettant le recrutement de plus de 7300 Camerounais entre 1940 et 1944 (Jennings, 2014) pour une guerre qui n’était pas la leur. Le maintien de la statue de Leclerc fait d’ailleurs partie intégrante de la grave crise mémorielle qui endeuille l’histoire contemporaine du Cameroun. Une parenthèse pour démontrer comment certains faits dans ce monde font des dénominateurs communs étranges. La soif de pouvoir sur les esprits des petites gens, tout comme l’impact de la propagande d’aujourd’hui en Ukraine, pourrait bel et bien être une fin en soi au service de l’arme ultime de destruction massive de l’adversaire.
C’est ainsi que notre réflexion revient aux travaux d’une valeur inestimable de Hannah Arendt sur le totalitarisme. Inestimable parce son oeuvre ne se cantonne pas aux régimes totalitaires du début du 20ème siècle spécifiquement étudiés (nazisme et stalinisme). Ils se révèlent aussi un puissant canevas théorique pour comprendre la toxicité et les impacts au sein des empires coloniaux et des grandes puissances, qui par leurs stratégies communicationnelles de fond survivent jusqu’aujourd’hui.
L’essence du champ d’étude sur le phénomène « totalitarisme » agit ainsi sur toute forme totalitaire, insoupçonnable pour certaines à priori, illustrée par cette citation ‘culte’ de Hannah Arendt. : « Le totalitarisme ne tend pas à soumettre les hommes à des règles despotiques, mais à un système dans lequel les hommes sont superflus. » Un précepte qui tend à expliquer toutes sortes de situations dans le monde d’aujourd’hui, y compris les coups de massues assénés de façon plus ou moins brutale sur les-dites démocraties du monde « civilisé » et « libre« . Mais voilà, le monde tourne en permanence, et avec lui la compréhension des Hommes, au fil du temps et des espaces.
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