Décédé le 27 décembre dernier à Paris, Doudou Diene a été enterré le 31 décembre à Saint-Louis sa ville natale. Avec sa disparition Saint-Louis et le Sénégal perdent un illustre fils tant l’homme au parcours multidimensionnel et au charisme unique a marqué de son empreinte son passage sur terre.
Doudou Diene a porté plusieurs casquettes au cours de sa vie mais il était avant tout journaliste. C’est cette profession qui le fait connaitre. Doudou Diene fut un journaliste chevronné. Homme d’une grande culture, d’une intelligence féconde et d’une rigueur sans faille, il fait partie de la classe des grands reporters, celle des légendes. Sa plume était redoutable, acerbe, précise et toujours exquise. Sa voix radiophonique était capable de sublimer le match de football le plus pourri et le plus impotent. Son duo avec Abdoulaye Diaw a marqué des générations entières. Doudou Diene présentera le journal parlé de Radio-Sénégal et dirigera plusieurs rédactions notamment au Gabon où il sera responsable du desk sport du quotidien l’Union. Lorsqu’on l’écoutait parler, on sentait tout de suite qu’il avait énormément lu, qu’il avait beaucoup voyagé et qu’il avait des centres d’intérêts étonnement éclectiques. C’est ce qui expliquait la richesse de son vocabulaire, l’abondance de ses succulentes anecdotes et références, la profondeur de ses analyses et la pertinence de ses éditos. Son ouvrage Lettres ouvertes aux Sénégalais, publié en 2008 aux éditions Niamagne est sous ce rapport un excellent héritage pour l’actuelle et la future génération.
Férus de musique et de théâtre, il a été chanteur et musicien dans une autre vie au Star Jazz . Fasciné par l’enseignement, il a été professeur d’espagnol au Sénégal et au Gabon. Passionné de basket, de handball et de sport en général, il fut gardien de but de football (junior) à l’Avenir de Saint-Louis. Doudou Diene est connu également pour être un Merengue, autrement dit un ultra du Real Madrid. Attentif à la marche de son pays, il n’en était pas moins un observateur averti de la géopolitique mondiale et embrassa aussi une carrière de diplomate. Sur les questions géopolitiques, j’avais particulièrement adoré notre échange une fois sur la crise palestinienne et les Etats Unis.
Son séjour au Gabon comme journaliste et comme professeur, ses nombreux déplacements professionnels à l’étranger comme reporter et ses pérégrinations en Belgique, au Maroc en tant que diplomate, lui ont donné l’opportunité d’être un formidable ambassadeur de l’élégance saint-louisienne. Saint-Louis, c’était sa terre. La terre qu’il chérissait. C’est dans son Saint-Louis, sur la partie nord de l’île, qu’il est venu s’installer après sa retraite. Devenu un patriarche et une icône de la ville, il s’impliqua grandement dans la vie sociale de celle-ci. Il mettra son expérience au service de la jeune génération en acceptant, pendant un temps, de donner des cours dans des grandes écoles de Commerce de la cité. Parallèlement, il présidera le comité de gestion de la Grande Mosquée de Saint-Louis (située non loin de son domicile). Le fils de El Hadj Tidiane Diene et Adja Fatou Gaye Babacar aimait particulièrement sa ville. Saint-Louis le lui a rendu en l’accompagnant à sa dernière demeure. « Pour être aimé, il faut aimer » nous apprend le dicton espagnol.
Monsieur le maire si vous peinez à trouver des noms aux rues et avenues de la vieille cité jusqu’à penser à votre beau-frère de Président, voici un nom à cocher et à stabiloter en gras à votre Conseil Municipal. ABF de l’Observateur a donné à juste raison plusieurs autres noms: Golbert Diagne, Jacques Diouf, Almamy Matheuw Fall, Mawade Wade, Médoune Fall, Madické Wade, Rokhaya Ndiaye (Mère de Serigne Babacar Sy), Serigne Mamoune Ndiaye, Alioune Petit Guèye, El Hadj Madior Cissé, Ababacar Fall dit Mbaye Boye, Diabou Seck, Salo Dièye, Majmouth Diop, Baye Galaye Diagne…J’ajouterai volontiers: Abdourahmane Sow, Assane Diop Pathé, Serigne Cheikh Mbacké, Abdou Magib Diop, Ahmet Bâ, Lamine Gueye, Abdoulaye Niang, Babacar Sarr, Rokhaya Sall dite Daba, Abdoulaye Seye Moreau, Djibril Sao, Aminata Fall, Aminata Sow Fall, Fatou Niang Siga, (longue vie aux deux grandes écrivaines), Louis Camara, Souleymane Bachir Diagne, Coumba Fall Léonie… sans oublier que Saint-Louis doit penser à raffermir ses relations avec le royaume du Maroc dont certains de ses ressortissants ont longtemps séjourné dans la vieille ville et en sont devenus des filles et fils à part entière. Enfin, même Senghor le poète n’a pas encore d’avenue dans cette cité hautement culturelle. Encore moins Abdou Diouf, saint-Louisien bon teint pourtant.
Tonton Doudou aurait, à coup sûr, apprécié cette petite digression pour parler de l’actualité en évoquant son décès. Il n’a pas eu le temps de signer la pétition « Apaisez les esprits ». Il l’aurait fait avec les deux mains.
Son départ pour l’Au-delà est un jour triste mais face à l’actualité, c’est un formidable pied de nez à l’équipe municipale actuelle qui, semble-t-il, recherche des saint-louisiens de valeur. Les morts peuvent ouvrir les yeux aux vivants disent les espagnols. Aux générations actuelles, tonton Doudou a l’air de dire : « reprendre en main votre cité, c’est votre mission. Si vous ne le faites pas, dans 50 ans un autre maire d’un même acabit que celui-ci, demandera à son conseil municipal: qui est Doudou Diene ? »
Un digne fils de Saint-Louis vient de nous quitter, un homme d’une grande urbanité. Doudou Diene est une grosse perte pour notre pays mais son œuvre va rester et inspirer les plus jeunes. Gaudi dit pour qu’une œuvre d’architecture soit belle, il faut que tous les éléments possèdent une justesse de situations, de dimensions, de formes et de couleurs. Ainsi a été la vie de tonton Doudou.
Longtemps, il a lutté contre la maladie. Pendant toute cette période, avec bravoure, Tata Marème son épouse, ses enfants, tata Mama sa sœur, ses enfants et ses petits-enfants, parmi lesquels, Caro, l’ont accompagné. Jusqu’à son dernier souffle, et après, ils sont restés dignes.
Le temps du repos est arrivé après une vie remplie. Tu continueras à vivre dans le cœur des êtres qui t’ont aimé car le parfum de l’âme, c’est le souvenir disait Georges Sand. Repose en paix tonton.
Je salue l homme, un digne fils de St Louis s’en est allé
Que le paradis soit son dernier refuge . Tu resteras en nous de par tes belles actions à travers ta foi .