« Une maison soufie » un roman sur la traite négrière et les racines de Gnaoua au Maroc

Mohamed Ait Taleb • Une Maison Soufie est un roman de 116 pages, en langue française, du romancier marocain Rachid Elhachimi. Dans cet ouvrage qui vient de paraître aux éditions le Lys Bleu, l’auteur aborde le passé esclavagiste du XVIIème siècle au Maroc. Une approche pour briser le silence autour d’une époque qui plaçait les Noirs en dehors de la société.

« Une maison soufie » un roman sur la traite négrière et les racines de Gnaoua au Maroc, Information Afrique Kirinapost

Premier roman en français de Rachid Elhachimi

Il s’agit principalement d’un roman historique et philosophique qui met l’accent sur la vie misérable et les coutumes soufies des Gnaouas, les descendants des esclaves au Maroc. A travers deux histoires qui se tissent de manière parallèle, l’auteur nous transporte dans les dédales du désert est-sud marocain et les ruelles des anciennes villes.

Ainsi, le premier récit raconte l’histoire d’une petite enfant Rahila habitant à Dar Gnaoua (la maison de Gnaoua) qui se trouvait aux marges de Merzouga. Le deuxième récit est celui de Sidi Blal Bnou Mohammad Soudani, qui a construit cette maison en plein désert, une maison d’Amour inconditionnel et des rencontres interculturelles, et a fondu cette Tarîqa (méthode ou voie) spirituelle de chercher Dieu.

Le roman commence par la mort du maalâm Kader, le chef de l’équipe de Gnaouas et le père de Rahila. Loin d’être malheureuse et mécontente car la personne qui était responsable de toute la famille est décédée, elle était tellement joyeuse car le voyage éternel de son père rigoureux lui permet de sortir vers son lieu préféré, le désert infini pour retrouver sa liberté intérieure.

Un matin, le grand-père qui a senti que sa mort était proche, donne à Rahila les sept feuilles historiques de leur aïeul Sidi Blal Bnou Mohammad Soudani, les feuilles qui font découvrir et explorer les racines de la pratique de Gnaoua au Sud-est marocain. Parce qu’elle ne sait ni lire ni écrire, Rahila a voulu entrer à l’école pour être susceptible de lire la manuscrit et dévoiler l’histoire de ses ancêtres.

Pour cela, sa mère Rabi’a a accepté son mariage avec Lakbir, le frère de son mari décédé, à condition que sa fille aie la chance de réaliser son rêve. Malgré sa mentalité conservatrice et fermée, l’oncle Lakbir qui était toujours conte la scolarisation des filles exprime son accord. Quelques jours plus tard, il a accompagné Rahila au village où elle a découvert la vérité de son destin : son oncle l’avait vendue au makhzen (l’Etat) pour travailler dans le palais du roi avec une dizaine des filles nègres.    

  Le manuscrit que Rahila n’arrive pas à le lire est un récit historique doté d’un grand nombre de marques temporelles et spatiales. Ainsi, il relate les épisodes de la création de l’armée des esclaves d’Al-Bukhârî par le sultan Moulay Ismail vers la fin du XVIIème siècle. Ce roi a obligé les bourgeois à lui vendre ses esclaves, et a conduit les harratins (les nègres libres) par la force à l’esclavage.     

En effet, Sidi Blal n’était qu’un soldat faisant partie de cette armée nègre dans le camp de Ramla aux marges de la ville de Meknès. Après plusieurs années de formation dans l’atelier des forgerons et d’entraînement militaire, il est sorti pour la guerre contre les révolutionnaires. Le moment où Sidi Blal a tué une personne de l’armée adversaire, il a été choqué car c’était la première fois dans sa vie qu’il tuait un homme.

Ainsi, il a fui la guerre en s’orientant vers l’inconnu. Dans les montagnes de l’Atlas, il fut trouvé évanoui par un derviche, ce dernier le fait entrer à une caverne où il lui a enseigné le dzikr (les appels de Dieu) et lui conduit vers la voie de la Lumière et celle de l’Amour.

Après avoir passé quarante jours dans la caverne en demandant le pardon du Dieu, et avoir découvert sa propre Tarîqa de chercher Dieu, il a voyagé vers la ville de Sijilmasa et en ayant découvert bien-aimée Lalla Bahia avec laquelle il va construire sa maison d’Amour au cœur du désert de Merzouga.

Bref, Une maison soufie constitue une œuvre d’une grande originalité littéraire et romanesque. L’image de l’Homme universel y est presque omniprésente, traversant les pages et les différents épisodes des deux récits. Les différents éléments de l’expérience spirituelle et interculturelle sont là pour faire vivre dans un monde pluriel où les frontières entre le soi et l’Autre sont totalement effacées.

Mohamed Ait Taleb est professeur de français en cycle secondaire qualifiant au Maroc.

Rachid Elhachimi est romancier et étudiant chercheur en master Langue et Communication à la faculté polydisciplinaire d’Er-Rachidia, Université Moulay Ismail- Meknès.  À son actif trois ouvrages en arabe : La mémoire du narcisse (roman publié en 2018), La petite Plante de Bambou (recueil de nouvelles publié en 2018) et Ksar Douira : lumières sur l’histoire, l’héritage et la culture (étude anthropologique publiée en 2019), et un roman en français « Une maison soufie »

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Rachid Elhachim

Photo Une:©ritimo.org

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