L’élection de Bassirou Diomaye Faye a marqué une rupture historique pour le Sénégal. Elle a mis en lumière la résilience d’un peuple et la maturité de ses citoyens, tout en enterrant un système qui perdure depuis les premières années d’indépendance, gangrené par le népotisme et éloigné de la justice et de la démocratie.
Pourtant, au cœur de cette transformation, la presse, pilier fondamental de toute démocratie, a souvent trahi sa mission. Depuis les années 2000 particulièrement, elle a été complice de nombreuses dérives. L’annonce d’une régulation par la nouvelle administration a donc suscité l’enthousiasme et l’approbation de tous, mais elle soulève des questions cruciales : qui a été consulté ? Quelle vision de la presse est promue ? Et comment protéger les données personnelles dans un monde où les abus numériques sont omniprésents ?
Une Presse en Crise Structurelle
Deux fondations essentielles à une presse de qualité manquent cruellement au Sénégal : des journalistes bien formés et un marché structuré. Le niveau global des professionnels est préoccupant, malgré des institutions prometteuses comme le CESTI et l’ISSIC.
Ces écoles doivent être soutenues par l’État, avec des investissements pour moderniser leurs infrastructures, recruter des enseignants de haut niveau et adapter les programmes aux défis contemporains tels que le journalisme numérique, les fake news et l’éthique des données personnelles. Une presse bien formée est une barrière contre la désinformation et un atout pour la démocratie.
En parallèle, le marché publicitaire doit être régulé avec des outils de mesure d’audience transparents, comme Médiamétrie dans d’autres pays. Sans ces mécanismes, le secteur restera dominé par des pratiques opaques, limitant le développement d’un écosystème médiatique équitable et durable.
Réguler Sans Asservir
L’obligation d’enregistrement des médias sur une plateforme officielle pourrait structurer le secteur, mais elle soulève des inquiétudes légitimes. Qui gérera ces données sensibles, et avec quelles garanties ? Sans une transparence totale, ces initiatives risquent d’instaurer méfiance et suspicion au lieu de renforcer la confiance.
Cependant, réguler ne doit pas signifier museler. Libre, disait Camus, la presse peut-être bonne ou mauvaise, mais quand elle n’est pas libre, elle ne peut être que mauvaise.
L’assainissement du secteur doit reposer sur des critères d’éthique et de qualité. Une presse compétente et responsable s’imposera naturellement, tandis que les médias médiocres s’effondreront dans un marché structuré.
Libre, Responsable et Visionnaire
La presse n’a pas pour rôle de servir les pouvoirs, mais de protéger l’intérêt général. Sans remonter bien loin, les dernières années de Macky Sall au pouvoir, particulièrement les 3 dernières, marquées par toutes sortes de dévouements, sont révélateurs quant à l’existence d’une presse responsable. Elles montrent (ces dernières années) qu’il est possible de traiter des sujets complexes avec professionnalisme. Ces modèles doivent devenir la norme.
Quant à l’aide publique, elle mérite une révision profonde. L’aide étatique à la presse est un anachronisme dégradant qui ouvre la voie à des formes variées de corruption — active, passive ou sous forme de contrôle insidieux. Avec une régulation transparente et un soutien solide à la formation, les médias devraient prospérer par leur qualité et non dépendre de subventions.
Construire une presse sénégalaise libre et responsable exige bien plus que des changements réglementaires. Cela nécessite une vision audacieuse, un dialogue sincère avec les acteurs du secteur et un engagement ferme envers la démocratie. C’est ce que le peuple, vigilant et résilient, attend. Et c’est ce que le Sénégal mérite.
Les rédactions de Xalima & blog Kirinapost
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