Pensée pour Osende Afana- Colonialisme et néocolonialisme freins au développement économique

C’est très probablement le 15 mars 1966 que le brillant économiste et leader révolutionnaire Osendé Afana fut tué au Kamerun alors qu’il conduisait un front révolutionnaire ouvert par son parti l’UPC afin de renverser le régime au pouvoir.

Son engagement, son courage, son dévouement à la cause du Kamerun se sont échappés de la chape de plomb du silence dans lequel ils furent longtemps entretenus. Son ouvrage intitulé « L’économie de l’ouest-africain » publié en 1966 par Maspéro donne un aperçu de ses convictions d’économiste. En effet il ressort de ce travail que le colonialisme et le néo-colonialisme sont des freins au développement économique.

Qu’il s’agisse des monocultures exportatrices issues du pacte colonial ou des privilèges d’accès aux ressources africaines par les anciennes puissance tutélaires, ce double concours est incompatible avec l’amélioration des conditions de vie des Africains. Pour ce qui est des monocultures ou des matières premières énergétiques dominant le spectre des exportations de nombre de pays, si elles permettent la constitution de fortunes africaines, elles soutiennent en priorité les industries importatrices extérieures.

Osende Afana regardait le Franc CFA comme un de ces privilèges par lesquels l’ancienne puissance tutélaire, la France (au même titre que la Grande-Bretagne et sa livre Sterling) pouvait accéder à coûts négligeables au pool des réserves des pays africains de la zone, lesquels n’obtenaient leurs propres réserves pour régler leurs achats internationaux que sur demande à la France. Cette dimension de pression sur les ressources à usage alternatif traduit le paradigme de la colonialité économique généralement, et en son sein, une économie de prédation dominée par les logiques de la force, de la violence, de la captation au lieu du contrat, du consentement, de l’intérêt collectif.

La suite de ce travail incite à étudier les continuités coloniales dans l’ordre de l’économie (matières premières, rentes des multinationales, …), utilisant le paradigme de la prédation dans une perspective décoloniale. La grille de lecture du néo-colonialisme suivant les théoriciens de la dépendance à de bonne heure pointé du doigt le rôle des entremetteurs et courtiers africains, afin d’isoler les composantes internes contribuant au frein du « développement ».  A vous chercheuses et chercheurs, pour une actualisation…

Share

Martial Ze Belinga est un économiste et sociologue camerounais. Son travail porte spécifiquement sur l’épistémologie de l’histoire africaine, les préjugés et les silences qui biaisent la compréhension du passé de l’Afrique et des diasporas africaines. L'art et la culture tiennent une place centrale dans son travail. À ce titre il est l'auteur de plusieurs ouvrages parmi lesquels: "Au-delà de l’inculturation. De la valeur propositionnelle des cultures africaines". Pour l'économie, ses travaux ont beaucoup porté sur la monnaie notamment le FCFA. il est l'auteur entre autres de: "Afrique et mondialisation prédatrice". Expert associé au comité scientifique international de l’UNESCO pour l’Histoire générale de l’Afrique, Belinga est éditorialiste et avait lancé le site Afrikara dédié à l'histoire, la culture et l'avenir du monde noir. Il a été par ailleurs sélectionné parmi les 20 « Experts » représentatifs de la diversité (Club XXIe siècle, France)

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *