L’académie des « dealogueurs »de la République a trouvé droit de cité au Cicad de Diamnadio et c’est sur cette même tribune qu’elle va procéder à la consécration de son roi, qui sera celui du millénaire. Le dilatoire érigé en vertu.
Pas de fumée blanche à guetter, ou de bulletins à déposer dans une improbable urne. C’est un roi du verbe et du mot qui est porté en triomphe. Mais un roi particulier. Le roi de l’entourloupe et de l’enfumage. Et qui pour le porter aux nues? À quelques exceptions près, une assemblée de vieilles branches, de grabataires avides de pouvoir et de lucre pour réfléchir et proposer à une jeunesse qui a soif d’enchantement, un récit émancipateur et des lendemains meilleurs. Des dinosaures du paléolithique, déterrés d’outre-tombe pour impulser des solutions de sortie de crise et la marche du siècle.
Ah, la belle affaire !
Le piège de l’impasse est une menace tout comme, on ne peut plus se satisfaire aujourd’hui de ranimer pieusement la flamme du souvenir. Nous avons à poursuivre la lutte au présent, ce qui est la meilleure façon de rester fidèles à l’idéal révolutionnaire.
De ce point de vue, force est de constater que ces groupuscules, se prenant eux-mêmes pour leur propre fin, ne sont plus en état d’impulser la lutte, ni théoriquement, ni pratiquement.
Ils ne font plus que marquer en creux la place occupée par la gauche anticapitaliste, dans un état antérieur du champ politique, avant le reniement socialiste, le désastre de la « gauche plurielle » et la recomposition des forces funestes de droite qu’elle a favorisées.
Les grandes douleurs sont muettes, mais il faut être capable de s’insurger pour exorciser la souffrance au plus profond de nous-mêmes ; pour ne pas être comptables des somnolences, de l’ignorance, des méfaits, de la méchanceté de ces octogénaires et centenaires qui veulent décider de notre devenir et retisser les liens d’une cohésion sociale en nous traçant les contours d’un pardon et d’une réconciliation nationale, non par altruisme et miséricorde à l’aune du mois béni de Ramadan mais très probablement par le truchement d’arguments sonnants et trébuchants et autres prébendes et sinécures… Sukëru koor oblige. Mais à la table du roi, peut-on parler la bouche pleine ? L’usage interdit de parler en mangeant et la bienséance a un côté qui innhibe les ardeurs…..révolutionnaires.
Ces vieillards, selon qu’ils sont en état de se déplacer pour justifier de leur présence effective dans une assemblée où la session se confond à une séance de sieste collective, les plus usés, somnolant quand ceux restés éveillés applaudissent.
Où en est l’impérative réconciliation entre nos concitoyens et leurs représentants politiques?
Pour s’appesantir sur la substance de ces conciliabules, ce sont les termes réconciliation et pardon qui m’interpellent le plus dans ces termes de référence d’un dialogue qui relève plus du dilatoire qu’autre chose. En effet, si pardon, il doit y avoir, qui pardonne qui? Que pardonne t-on et à quel prix ?
Il faut situer les responsabilités de tous les méfaits et crimes aussi bien économiques que de sang commis contre le peuple sénégalais.
C’est trop facile de parler de pardon quand aucune enquête n’a jamais été ouverte pour tirer au clair les circonstances de cette violence étatique démesurée contre sa propre population et situer les responsabilités autour de meurtres d’une centaine de jeunes sénégalais juste coupables d’avoir voulu marquer leur citoyenneté en manifestant contre les pratiques liberticides de nos gouvernants.
Et qu’en dire, quand le coude adipeux du prince pèse encore lourdement sur tous ces dossiers de prévarication des biens communs, quand les ripoux sont surprotégés et les opposants persécutés et avilis…
Il est malgré tout de bon ton d’évoquer l’impérative réconciliation entre nos concitoyens et leurs représentants politiques. Où en sommes-nous aujourd’hui ? Et qui va réellement s’engager pour une nouvelle République, en rupture avec ces successifs régimes néo coloniaux qui ont décidément fait leur temps ? Voilà les postulats qui s’imposent à nous.
Vérité et justice doivent primer sur un quelconque dialogue dilatoire…
Et le comble, c’est quand des soi-disants candidats recalés au parrainage citoyen, invoquent l’injustice du processus biaisé alors que tout leur groupe réuni est incapable d’obtenir 2% des suffrages et en sus, viennent soutenir la monstruosité d’un report et la rhétorique d’une amnistie à peine voilée, ouvrant la voie à des manipulations attentatoires à la morale démocratique et à la justice populaire. C’est donc cette belle trouvaille qui vient à la rescousse du chef : les spoliés pollueurs, qui sont d’ailleurs en grande partie la cause de toute cette poussière asphyxiante sous nos cieux.
Des évènements plus dramatiques, tel que l’assassinat d’un juge constitutionnel se sont passés dans ce pays, sans que le processus électoral ne soit pour autant interrompu. Il importe par conséquent au Chef de l’État de prendre cette nécessaire responsabilité de fixer sans délai la date du scrutin pour enrayer la rupture constitutionnelle et remettre le pays sur les rails.
Une impérieuse nécessité de renouveler la classe politique
Renouveler la classe politique devient une impérieuse nécessité pour sortir de l’impasse démocratique dans laquelle le pays s’est enlisé par le fait d’un personnel politique obsolète et qui veut continuer à faire la pluie et le beau temps au grand désarroi des Sénégalais.
Il urge de répondre à cette faim d’un monde nouveau, devenue irrépressible à la suite à la fin de l’ancien, et de satisfaire les attentes des masses plus que jamais conscientes de leur puissance et de la vertu fondatrice de leur violence.
Et ne l’oublions pas, la postmodernité est par excellence l’âge des foules aux sens débridés, aux communions émotionnelles.
Têtus comme des bourriques, nos gouvernants n’arrivent pas à comprendre que le peuple ne veut pas de dictature, quelle que soit sa couleur, et que l’autoritarisme de papa ne réussira plus à se restaurer dans une société juvénile, réveillée, qui plus est à sa puissance instituante.
Ce dialogue qui peine à être inclusif tant les forces vives de cette nation l’ont vomi, augure d’un échec patent. Rien d’étrange pour une gouvernance qui a raté le coche du vertueux et de la sobriété pour tomber dans une terrible crise de représentation et qui souffre d’une grave impuissance publique et d’un profond déficit de sens. En revendiquant comme du courage de réformer en bande organisée contre sa population, ce dialogue d’oligarques, de parvenus et de fantômes ressuscités préside une démocratie malade.
Une « démocratie-répression » qui y aurait perdu, en cours de route, à la fois le peuple qui la fonde, le gouvernement qui la maintient et l’horizon qui la guide…
Le diagnostic n’est pas nouveau mais cette crise artificielle, créée de toute pièce par le palais pour gripper la machine du renouveau démocratique nous plonge indubitablement dans le crépuscule de la République.
Qui pour nous sortir de l’impasse ?
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