Alors que l’obélisque d’Axoum a été restitué à l’Éthiopie, l’obélisque de Louxor est toujours à Paris-Restitution

En 2005 l’Italie devait restituer à l’Ethiopie l’obélisque d’Axoum pillée par l’Italie coloniale en 1937. L’obélisque de Louxor, construite il y a plus de 3000 ans sous Rames II est elle, dans la capitale française à Paris place de la Concorde depuis 1836.

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Considérée comme un « cadeau » d’un officier d’origine albanaise devenu sultan ottoman et vice-roi d’Egypte, Mehemet-Ali, la France sous Mitterrand a consenti à renoncer à l’autre obélisque qui faisait partie du même cadeau. Offre d’un colon sans lien culturel avec la civilisation africaine pharaonique portant sur des œuvres vieilles des plusieurs millénaires. Si le débat sur la restitution prenait tout son sens, incluant les nécessaires réparations culturelles, l’obélisque de Louxor aurait-il sa place à la Place de la Concorde à Paris ?

25 octobre 1836. Le ciel est couvert en région parisienne, mais, par chance, il ne pleut pas raconte le site domaine-randan.fr. Sur la place de la Concorde, près de deux cent mille personnes jouent des coudes pour ne rien rater du spectacle. Jusque sur les terrasses des Tuileries et l’avenue des Champs-Élysées, la foule se presse. À 11h30, juché sur un piédestal, l’ingénieur Apollinaire Lebas (1797 – 1873) donne enfin l’ordre tant attendu, terme d’un périple de 9000 kilomètres et qui aura duré pas moins de 7 ans !

Comment en est-on arrivé là ? Tout commença en 1829, lorsque le vice-roi d’Égypte Méhémet-Ali propose de faire don à la France de 2 obélisques d’Alexandrie. L’égyptologue Jean-François Champollion exhorte le gouvernement français à porter son dévolu sur ceux du temple de Louxor, deux monuments édifiés sous le règne de Ramsès II “le Grand”, au XIIIe siècle av JC. Mieux conservés & plus prestigieux, pour Champollion, qui ne veut pas se faire doubler par les anglais, ils sont “d’un travail exquis”.

Cependant, situés à 700 kilomètres en amont de l’embouchure du Nil ! Le gouvernement égyptien finit par donner son feu vert & dans les mois qui suivent, un navire de transport étonnant, le Luxor, est construit sur mesure à Toulon. En avril 1831 rappelle toujours domaine-randan.fr, c’est le départ tant attendu. Quatorze mois plus tard, l’équipage ayant fait face à une épidémie de choléra, surmonté les obstacles techniques de la dépose de l’obélisque, lequel présentait une fissure de 8 mètres à sa base, descendu le Nil en crue, ayant réalisé cinq escales à Rhodes, Corfou, Toulon, Gibraltar & La Corogne, arrive enfin à Cherbourg avec le précieux chargement. Après le Havre et Rouen, c’est enfin le remorquage par des chevaux de halage le long de la Seine. L’avant veille de Noël 1833, l’obélisque est enfin à Paris !

Rappel sur l’histoire de l’obélisque d’Axoum source: Arthemis Université Genève 

En 1937, Mussolini ordonne l’enlèvement de l’obélisque d’Axoum et son transport en Italie. Il faudra attendre 2007 pour que l’obélisque retrouve le site d’Axoum.

  • En 1937, ensuite de l’annexion de l’Ethiopie par l’Italie, le second obélisque le plus massif d’Axoum est enlevé par les forces armées italiennes et transporté par route puis par bateau en Italie. L’Obélisque, brisé en cinq morceaux et âgé environ de 1700 ans, pèse 150 tonnes et mesure 24 mètres de long.
  • Le 31 octobre 1937, le régime fasciste de Mussolini inaugure l’érection de l’obélisque sur la Piazza di Porta Capena à Rome.
  • Le 10 février 1947 est conclu un Traité de Paix entre l’Italie et les Puissances Alliées et Associées (dont fait notamment partie l’Ethiopie). Selon l’art. 37 du Traité « dans un délai de dix-huit mois à compter de l’entrée en vigueur du présent Traité, l’Italie restituera toutes les œuvres d’art, tous objets religieux, archives et objets de valeur historique, appartenant à l’Ethiopie ou à ses ressortissants, et transportés d’Ethiopie en Italie depuis le 3 octobre 1935 ».
  • Le 5 mars 1956 est signé à Adis Abeba un accord concernant le règlement des questions économiques et financières découlant du Traité de Paix de 1947 et la collaboration économique entre l’Ethiopie et l’Italie. Trois annexes à l’accord font état de la mise en œuvre de l’art. 37 du Traité de Paix (objets déjà rendus, objets à rendre s’ils sont retrouvés et obélisque d’Axoum). En l’annexe C, l’Italie reconnait que le grand obélisque d’Axoum, actuellement érigé à Rome, doit être restitué à l’Ethiopie.
  • Le 4 mars 1997, l’Ethiopie et l’Italie ont signé une déclaration conjointe sur le retour de l’obélisque d’Axoum.
  • Le 18 novembre 2004, l’Ethiopie et l’Italie ont signé un protocole d’accord relatif à la restitution de l’obélisque.
  • En avril 2005, l’obélisque a été transporté à Axoum avec des avions Antonov (les plus gros avions cargos disponibles).
  • En juin 2007, les travaux de remise en place de l’obélisque ont débuté.

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Martial Ze Belinga est un économiste et sociologue camerounais. Son travail porte spécifiquement sur l’épistémologie de l’histoire africaine, les préjugés et les silences qui biaisent la compréhension du passé de l’Afrique et des diasporas africaines. L'art et la culture tiennent une place centrale dans son travail. À ce titre il est l'auteur de plusieurs ouvrages parmi lesquels: "Au-delà de l’inculturation. De la valeur propositionnelle des cultures africaines". Pour l'économie, ses travaux ont beaucoup porté sur la monnaie notamment le FCFA. il est l'auteur entre autres de: "Afrique et mondialisation prédatrice". Expert associé au comité scientifique international de l’UNESCO pour l’Histoire générale de l’Afrique, Belinga est éditorialiste et avait lancé le site Afrikara dédié à l'histoire, la culture et l'avenir du monde noir. Il a été par ailleurs sélectionné parmi les 20 « Experts » représentatifs de la diversité (Club XXIe siècle, France)

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