20 Décembre 2001-20 Décembre 2021. Il y a 20 ans le Président Léopold Sédar Senghor disparaissait. 20 ans jours pour jours après qu’il a quitté le pouvoir en 1981. Symbolique coïncidence, pour quitter la scène d’un monde qu’il aura marqué de toute sa puissance poétique, qu’il avait mise en actions.
Senghor a transmis le pouvoir au Président Abdou Diouf, il y a donc 40 ans. Cela paraît si loin. Pourtant le Sénégal revenait d’encore plus loin, et le chemin parcouru par notre démocratie est parsemé de visions, et d’espoirs parfois déçus pour le développement de notre pays, à travers des combats d’hommes et de femmes qui autour de lui souvent, et parfois contre lui ont participé à l’écriture de notre Histoire.
Au moment où certains leaders africains s’accrochaient au pouvoir, de manière indécente, où la seule interruption du mandat présidentiel ne pouvait se concevoir que par un complot souvent sanglant ou par la mort naturelle du Président à vie, au moment où les élections étaient travesties en grotesques parodies, le renoncement volontaire et choisi à la magistrature suprême de la part d’un chef historique, d’un « Père de la Nation » pouvait avoir une portée symbolique et effective d’une indéniable valeur. Peu de gens savent que des personnes se sont opposées à ce départ et fait historique, parmi cette catégorie, figuraient les guides spirituels des Mourides et des Tidjanes, les deux confréries musulmanes majoritaires du pays. Leur raisonnement était clair et selon eux, si Senghor, le catholique, arrangeait les deux chefs musulmans, la compétition qui s’établira après son départ, pouvait opposer leurs confréries pour la conquête de la Magistrature suprême au bénéfice de l’un de leurs représentants.
Mais les sénégalais savaient eux que leur chef d’état était arrivé au bout de ses rêves de développement du pays qu’il avait dirigé d’une façon autoritaire certes, mais empreinte d’une grande orthodoxie républicaine. Il avait d’abord observé, choisi, guidé et enfin nommé son successeur, en la personne du Président Abdou Diouf, dont il avait su apprécier le sens élevé de la méthode et de l’organisation gouvernementale et étatique.
Senghor, un Chef qui savait « cheffer ».
Cet homme savait que l’exemplarité était à la base de l’autorité naturelle que l’on peut avoir sur des hommes et des femmes qui n’ont rien de moins que vous et auxquels vous devez respect et considération. Les bases de son autorité que l’on pouvait croire naturelle, étaient déterminées par le choix d’hommes et de femmes de qualité, instruits, éduqués, discrets, et surtout emplis de cette humilité qui font les hommes d’état. Avant toute chose, ils devaient avoir un grand sens de ce qu’était LA REPUBLIQUE. Et surtout en connaître la liturgie, son application qui n’était pas contenue dans des textes et des règlements, mais aussi ils devaient comprendre qu’un pays et un état, à travers son Gouvernement a besoin d’être organisé avec sens et méthodes. Et nombreux sont les hommes que l’on disait du sérail de Senghor qui ont été biberonnés aux règles simples et logiques de ce qui était appelé, le BOM, le Bureau Organisation et Méthode.
Les affaires de l’état ne traînaient pas sur la place publique, personne ne s’avisait comme maintenant avec cette vulgarité des parvenus, à clamer urbi et orbi, devant n’importe quelle assistance, dans les lieux les plus louches parfois, « le président m’a dit…j’ai dit au président ».
Les enfants de ses ministres ne connaissaient pas l’intérieur de la voiture de fonction de leurs pères, pour n’y être jamais monté, alors que les enfants de ceux d’aujourd’hui conduisent ces véhicules de l’état à leur guise, alors que la règle était de les garer dès la fin de son service avant d’utiliser sa propre voiture. Autres temps autres mœurs…
Le Palais de la République n’a jamais abrité du temps de Senghor des réunions politiques, et comme celles-ci se tenaient à l’Assemblée Nationale et que le reproche lui en fut fait, il décida de la construction de la Maison du Parti Socialiste, à l’intérieur de laquelle il créa l’école du parti d’où sortirent les cadres parmi les plus influents de notre pays.
Nous allons causer d’un temps que les moins de…40 ans ne peuvent pas connaître, les temps où l’on nettoyait à l’eau et au savon les trottoirs de Dakar, où les arbres étaient correctement coupés au lieu d’être sauvagement élagués, pour en vendre les branches, les temps où le service d’hygiène vous mettait des amendes pour défaut de poubelles à domicile…et la liste des choses que la république nous offrait et nous enseignait est loin d’être exhaustive…
Il était impossible qu’un homme se fasse remettre une enveloppe bourrée de millions pour services rendus de fait de vol de documents. Des hommes capables d’organiser de telles insanités n’existaient pas dans son entourage, puis que le sens de la République était l’Alpha et l’Omega de la gouvernance de notre pays.
Il est intéressant de noter que c’est à l’occasion de la célébration des 20 ans de la disparition de Léopld Sédar Senghor, que Abdoul Aziz Tall, cet ancien du fameux BOM, Bureau Organisation et Méthode, pointant le désarroi du Président Macky Sall, face au désordre qui caractérise son administration, met sa plume au cœur de cette plaie qui gangrène notre démocratie, et notre administration, et qui permet à n’importe quel gougnafier, de se pavaner avec désinvolture dans les arcanes d’un pouvoir, jadis imprégné de rigueur et d’éducation exigés par la République!!! Je ne pense pas que de son temps, un hurluberlu de Ngom aurait pu approcher le Président pour une vulgaire remise d’enveloppe.
Il serait temps que le Président Macky Sall apprenne à « CHEFFER »… comme un chef d’état et garant de l’esprit de notre République…qui n’a jamais été bananière…
Jean Pierre Corréa
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