Sàmba Jabbere, YEDAAKE

Depuis Samba Gelaajo, les princes Pël portaient ce nom.
Et, suivait toujours un qualificatif en rapport avec la nature ! Gelaajo était en référence à sa témérité et sa coriacité qui renvoient au fruit « géleeje » (konkorong).

Samba Diabare, « jabbere » très certainement, une prémonition de sa longévité pour dire « solidement planté. »

Linguère, ville de naissance de Samba Jabbere, est le cœur de cet instrument monocorde, appelé « xalam » en walaf.
Plus qu’un instrument, ce luth royal était un interlocuteur à qui l’artiste demandait de lui parler, de lui « révéler des secret » : « haal nam ». Le glissement en fit « xalam. » Il y’a d’ailleurs encore des devins qui l’utilisent pour prédire l’avenir et conjurer le mauvais sort.

Le Xalam est venu très certainement avec les griots guinéens accompagnant un prince que les livres d’histoire appellent « Koli Tenguela » ; alors que cette nomination n’était qu’un descriptif pour dire « ceux qui marchent, les instruments à l’épaule ». L’HGS nous dira peut-être enfin son vrai prénom.

Le Jolof EST une grande partie de l’histoire musicale du Sénégal. Il y’a urgence d’y perpétuer la fabrication et l’apprentissage au xalam, en faisant de la région de Louga un « pôle de promotion ». Il n’y aurait par exemple, à Kébémer, qu’un seul joueur de xalam aujourd’hui !

Samba Jabbere et les autres maîtres du Jolof nous ont familiarisé avec beaucoup de mots et expressions Pël. Même si c’est avec beaucoup de “déformation”

Quelques exemples, repris encore par les jeunes « gawlo »

– « Yedaake » (plutôt « yedde taa ke » = ki ken dul xax), titre magnifiquement repris à l’époque par Doudou Sow du Number One

– Tooroodo, Samba ngaari jamma (en hommage à Elhadj Omar, fils cadet de Adama Aïssa (kodde Adama Aïssa)

– «Lee lee» : qu’il entonne toujours majestueusement en aigu, pour dire « yàgg na yàgg »

– « Tooroodo, njangee, njuulé, son tikkii Allah jinga » : (en hommage aux premiers convertis pour leur rappeler leurs obligations de s’instruire et de prier afin d’avoir Dieu à leurs côtés)

– « So neene mojjii, baaba moji, ɓingel bonataa (le walaf dirait « kéwél du tëp, domm ja bëtt )

– Aduna ko béelel jéeri, dunyaa ko meere (ce monde est un petit étang du désert et la vie y est insignifiante)

– Yummà rokku ma, waaj ma. Bàmmà rokku ma, waaj ma. Kono ɓingél waaja taa ma (une fois à l’âge adulte, nos parents ne nous doivent plus rien. Mais nos enfants, si)

– Ngaari mo gite joy, gallaaji jeegom, so hawaani, hulɓi nii ma (un taureau à 5 yeux et 6 cornes, même s’il n’attaque pas, appeure)

Repose en paix, Maam

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Auteur et Critique d'Art, Umar Sall est une figure connue du milieu culturel dakarois. Il s'intéresse à la richesse des langues traditionnelles. D'origine Pular, qu'il parle couramment, il a aussi une maitrise bluffante du walaf (À l'ecrit comme à l'orale). Umar Sall a une parfaite connaissance du fait culturel. Dés lors, ses analyses et ses reflexions sont pour le moins attendues. Retrouvez- les sur Kirinapost. À lire : Les Coquillages de la mort" Editions Broché – 2014

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