Mustafa Naham : Éternel nomade en quête d’Ailleurs

Il fait partie de la nouvelle vague d’artiste qui fait bouger les lignes de la musique sénégalaise. Originaire du Walo au Nord du pays, il puise dans la riche et diverse culture de cette grande région du fleuve pour offrir une musique dépouillée, savoureuse et ouverte sur le monde. Quant à sa voix, elle rappelle à s’y méprendre celle d’Ismaël Lo. Comme son idole, Mustafa s’essaye au cinéma. Il est à l’affiche du film Amin de Philippe Fauchon. Le film a été présenté au Sénégal le 28 mars dernier à l’Institut Français de Dakar et 29 mars l’Institut Français de Saint-Louis). Mustafa Naham est sur Kirinapost..

C’est dans les Jardins de l’Institut Français de Dakar, autour d’un bon Bissap, que nous rencontrons Mustafa Naham. C’est une Journée sympathique et en cette fin d’après-midi, la fraicheur commence à s’installer sur la capitale.

« Je reviens tous les ans. J’ai besoin de passer du temps au Sénégal dans le terroir. C’est une source intarissable d’inspiration » nous explique l’expatrié. En effet, Mustafa Naham vit en France depuis 2014.

Issu d’une famille de fonctionnaires, ses deux parents sont agents administratifs, le jeune Mustafa au gré de leurs affectations découvre le Sénégal des profondeurs. Le terroir comme on dit : Sédhiou, Ziguinchor, Kolda, en somme une grande partie de la cette belle Casamance tant est si bien qu’il porte en lui, et la richesse culturelle du nord et celle du Sud. À Dakar aussi, plus précisément à la Patte d’Oie où il séjourna un moment, il grandi avec la musique fantastique du groupe Missal dont les membres habitent le quartier.

À la maison Mustafa plonge très tôt également dans les discussions empreintes de tolérance et d’ouverture à l’autre.  Ses parents écoutent du Aretha Franklin et du James Brown en plus des chants et danses traditionnels. Il adore ça et ne se prive pas de rester cloitrer derrière la scène lors des veillées culturelles pour écouter les chanteuses pular. Ces moments l’impressionne au plus haut point. Cependant, ses parents l’incitent à poursuivre ses études. Il ira jusqu’à l’université.

Devenu assistant administratif à l’Université de Bambey, il soutient les revendications estudiantines tout en fredonnant des airs aux heures de travail. Des collègues, son premier public, l’incitent à pousser l’expérience plus loin. Cela tombe bien Baba Hamdy claviériste et producteur réputé est son ami. C’est dans le studio de Hamdy qu’il pose quelques chansons.

Sa  voix ressemble comme on l’a dit plus haut à Ismaël Lo et il avoue même aujourd’hui, avoir trouvé des dates de concerts grâce à cette ressemblance. Ismaël Lo est son idole. Même s’il a son propre style Mustafa est fier de cette comparaison. 4 autres légendes sénégalaises l’inspirent. Il les appelle les 5 majeurs. Ismaël Lo, Thione Seck, Youssou Ndour, Omar Pene Baaba Maal. Avec ce dernier, il partage les racines du nord. Mustapha est né à Saint-Louis et a passé une partie de son enfance à Podor ville natale de Baaba Maal.

De ses débuts en 2006, jusqu’en 2013 où il reçoit le prix Visa pour la Création de l’Institut français  et où il sort son premier album « Guidelam » (mon amour) sous le label Les Enchanteurs  Mustafa travaille sa voix et ses textes, s’abreuve de divers sonorités et multiplie les expériences. Il faut dire qu’il est d’abord mélomane. C’est pourquoi « Guidelam » sonne non pas comme un album de débutant mais comme celui d’un artiste mature.

Mustafa Naham : Éternel nomade en quête d’Ailleurs, Information Afrique Kirinapost

Aujourd’hui Mustafa à la tête de Naham Trio, projet initié avec Moustapha Gaye le génial guitariste de Youssou Ndour,  parcourt l’Europe en présentant une musique épurée et agréable avec à la clé un album sorti en 2016 intitulé Naham Trio tout simplement. Entre le jazz et l’Afro, les titres de l’opus, tout en acoustique, chantés en français est un pur délice.

« Le Mbalakh est notre rythme on doit en être fier mais les influences viennent aussi de partout et on a le devoir de s’enrichir des autres sans se pervertir » soutient le chanteur quand on l’interroge sur sa musique.

Ce band réduit lui permet également de proposer beaucoup de concerts privés aux cours desquels, étant proche du public de façon presque intime, il raconte son Afrique et témoigne des réalités de son continent.

« Je n’ai pas besoin de revendiquer mon africanité. C’est déjà en moi. La jeunesse africaine ne pleurniche plus elle ne culpabilise pas non plus. Elle sourit. » explique-t-il faisant référence à sa magnifique chanson l’Afrique qui sourit.

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Mustafa a foi en la jeunesse africaine

Si son Afrique sourit, pourquoi prend-elle alors  la mer malgré les dangers ?

« C’est justement parce qu’elle en veut. La jeunesse africaine souhaite  s’épanouir, acquérir des connaissances. Elles est résolument tournée vers l’avenir mais comme le rythme de développement du continent est encore lent, elle tente tous les possibles » développe l’artiste.

Conscient que cet avenir passera pas l’éducation,  Mustafa ne fait pas que témoigner dans ses textes comme il dit. Il met la main à la pâte et invite lors de ses concerts privés les donateurs à financer des projets comme « Sons au salon » qui consiste à monter des bibliothèques dans les petites écoles sénégalaises. Le public adhère.

D’ailleurs, la première donation a été pour la petite école protestante de Dakar où Naham a exercé un temps.

En outre, toujours dans sa quête de participer à l’épanouissement du continent , Mustafa a initié un Festival à Dagana dénommé « Diala Waly festival ».

« Avec la Compagnie Sucrière Sénégalaise installée à Richard Toll, le Walo a vu débarquer des travailleurs d’origine Diola, sérère, et tout ce beau monde se mélange aux maures, wolof et pular. A partir de là, nait une richesse culturelle sans commune mesure. L’idée du Festival est justement de valoriser toute cette richesse » renseigne-t-il.  En deux volets, le festival offre un plateau pour les musiques traditionnelles et ensuite une scène plus éclectiques.

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Mustafa sur le plateau du film Amin

A côté de ses activités de Directeur Artistique de Festival, Mustafa s’essaye aussi au cinéma en tant qu’acteur. En 2018, il joue dans Amin le film du réalisateur français Philippe Faucon. L’Expérience lui a plu et il ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. Décidément, il ne ressemble pas à Ismaël Lo qu’à la voix. Pourquoi toute cette activité ? Une course vers la célébrité ?

« La célébrité je n’y pense pas. Je fais les choses que j’aime et qui me parlent sans me prendre la tête » réagît celui qui refuse même de faire un bilan d’étape sur sa carrière.

« Je ne sais même pas avec exactitude quand j’ai commencé ma carrière. Je me focalise plus sur mes feeling sans me retourner. Ce qui doit arriver arrivera toujours » dit-il avec philosophie.  En attendant, il prépare un nouvel ‘album pour 2020 dénommé Paris-Ouaga-Dakar. Un projet qu’il partage avec Kantala du Burkina Faso et Dominique Prévost de la France.

Chanteur (cinquantaine de concerts à travers le monde par an),  producteur de festival, Secrétaire du festival Onlyfrench ( festival qui a lieu entre l’ Afrique et la France ), acteur de cinéma, philanthrope, Mustafa Naham aime toutes ces casquettes et ne se donne aucune limite,  en bon homme du Nord, il est un éternel nomade, toujours à la quête de sensations. Toujours à la quête d’un nouvel ailleurs.

 

 

ITV réalisée en septembre 2018

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2 Comments

  1. Macbookpro Reply

    Arrêtez de comparer la voix de ce Naham à celle d’Ismael Lo. Il y a une éternité entre les deux !
    Soyez un peu plus respectueux envers ce monument de la musique africaine et mondiale qu’est Iso.

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