Abdoulaye Diabaté (Kora Jazz Trio): « Le folklore Africain est inépuisable »

C’est l’un des trios les plus magiques de la scène musicale. Entre tradition africaine et sonorités occidentales, il ne cesse de surprendre par sa créativité et son originalité. Piano, percussions et Kora qui le composent font voyager le mélomane à travers le monde et lui font découvrir une musique d’une richesse inouïe. Le Kora Jazz Trio, puisque c’est de lui qu’il s’agit, propose au public un nouvel album cette semaine.  A la baguette de ce formidable projet initié en 2003, le pianiste et virtuose sénégalais Abdoulaye Diabaté revient avec Kirinapost sur la sortie de Part IV.

 

Kirinapost : 4 ans entre le dernier album et celui-ci. Qu’est-ce qu’il s’est passé ? Vous privilégiez les tournées ?

Abdoulaye Diabaté : Il est vrai que nous avons beaucoup voyagé, mais je pense surtout qu’il faut prendre son temps quand on veut faire de bonnes choses. Ensuite, la formule Trio demande beaucoup plus de réflexions en ce qui concerne la conception et le choix des œuvres.

Kirinapost : Le nouvel album s’intitule Part IV alors qu’il va être le 6eme dans votre discographie ? Pourquoi IV et pas Part VI ?

Abdoulaye Diabaté : Le groupe expérimente toujours des formules. Nous avons commencé par la formule Trio et les Parts s’y adaptent très bien. Part 1,2,3, c’est la réunion de trois solistes sur scène. Piano, Kora, Percus. Après nous avons expérimenté la formule Band avec des guests (invités). Avec cet nouvel album, nous revenons au Part.

Kirinapost :  Kora Jazz, toujours à la recherche d’un dialogue entre les sonorités africaines et celles occidentales ? Peut-on résumer ainsi ce nouvel album ? Dites-nous-en davantage…

Abdoulaye Diabaté : Je crois le groupe est à l’avant-garde de cette fusion. Le folklore africain est la base du groupe. Sa force (le groupe) est d’être dans l’univers du jazz, qui n’est pas seulement américain, en mettant en avant des instruments traditionnels comme la Kora et le balafon. Pour cet album nous avons pu compter justement sur des musiciens comme le balafoniste Adama Condé, le guitariste Hervé Morisot, le contrebassiste Manuel Marchez et aussi le timbaliste colombien Boris Calceido. Sans oublier la belle voix du chanteur Woz Kaly sur le titre de Fayda. Toujours à propos de cette fusion, nous vous amenons en voyage. De la musique traditionnelle malinké avec Siragnan-Fain, à Moanin’, morceau phare des jazz Messengers, en passant par la reprise de Via Con Me de Paolo Conte, nous traversons les continents. Nous rendons aussi hommage à la diva cap-verdienne Cesaria Evora en reprenant son fameux succès Sodade.

Kirinapost : Comment avez-vous travaillé sur cet album ?

Abdoulaye Diabaté : Nous avons pris notre temps. Comme on revenait à la formule des Parts, on s’est donné du temps. Je l’ai conçu au cours de différents voyages, même si une bonne partie a été travaillée au Sénégal. Dès que j’avais un moment, je me rendais à Dakar, je me faisais installer un piano dans mon appartement et je passais pratiquement toute la journée à écrire les arrangements.

Kirinapost : Vous avez composé tous les titres ?

Abdoulaye Diabaté : Pour l’essentiel. En réalité, j’en ai composé sept et Cherif Soumano en a composé un. Par contre j’ai fait tous les arrangements. Il fallait veiller à garder la couleur Kora Jazz Trio.

Kirinapost :  Kora Jazz est plus connu dans le reste du monde qu’en Afrique. Séduire les mélomanes africains est-ce une préoccupation pour vous ?

Abdoulaye Diabaté : C’est vrai que le Kora jazz trio est plus connu dans le reste du monde qu’en Afrique. C’est une vraie préoccupation pour le groupe, car on est jamais mieux que chez soi. Néanmoins, nous venons presque à chaque sortie d’album, jouer à l’Institut Français de Dakar par exemple. Nous avons même joué une fois au Just4you, toujours à Dakar. Nous pensons que ce n’est pas assez car le groupe voyage énormément et on aimerait en faire autant pour le continent. Malheureusement, Kora Jazz Trio n’est pas assez sollicité dans les grandes manifestations culturelles du pays.

Kirinapost :  Le groupe a vu passer 4 koristes de renom, Djeli Moussa Diawara feu Soriba Kouyaté, Yakhouba Sissokho et maintenant Cherif Soumano. Qu’ont apporté ces koristes et quelle est la particularité de Cherif, le dernier venu ?

Abdoulaye Diabaté : Chacun de ces koristes est particulier. D’abord, il y a eu Djeli Moussa Diawara. Il avait la particularité de chanter en plus de jouer à la kora. Puis, il y a eu Soriba Kouyaté, Paix à son âme. Lui, c’était le maître absolu de la Kora. Pour la petite histoire, Il a fallu formé tous les Koristes qui ont joué avec nous, sauf Soriba. Il était en synchronisation avec moi puisqu’on avait démarré l’aventure ensemble à Dakar du temps où je dirigeais l’orchestre national. A cette époque déjà, Soriba et moi travaillions beaucoup et on reprenait notamment des thèmes de Charlie Parker. Ce fut une grosse perte pour le groupe et pour les arts. Après le décès de Soriba, il fallait un bon Koriste et notre choix s’est porté sur Yakouba Sissokho. Yakouba représentait toute la richesse de la Sénégambie. Quant à Cherif Soumanou, qui est désormais avec nous, c’est un jeune koriste, une valeur montante. Quand on sort de l’école de Toumani Diabaté, Maître koriste qu’on ne présente plus, on ne peut être que bon. Il est de la même génération que Sidiki Diabaté. Je peux même dire qu’ils sont frères et tous les deux sont issus de la même école. Alors, disons qu’il a été à bonne école.

Kirinapost : Le jazz, le blues et beaucoup de musiques sont nées en Afrique. Aujourd’hui encore,  avec les sonorités venues du Nigeria par exemple, elle est continuellement entrain de proposer des choses nouvelles…

Abdoulaye Diabaté : Le folklore Africain est inépuisable. Comme vous venez de dire, tous ces genres musicaux ont leurs sources en Afrique. Tout ce que nous faisons, c’est juste l’améliorer, l’universaliser et le mettre aux standards internationaux pour que le monde entier y ait accès.

Kirinapost : Aujourd’hui, le monde se rue vers le continent noir, lui promettant un avenir radieux. En tant qu’artiste comment voyez- vous cette perspective ?

Abdoulaye Diabaté : L’Afrique a tout pour son développement et sur tous les plans, il faut juste une volonté politique de nos dirigeants afin qu’ils soient davantage au service des populations.

Kirinapost : Revenons à ce nouvel album. Une tournée est -elle en préparation ? Si oui passera-t-elle par l’Afrique ?

Abdoulaye Diabaté : Nous sommes sollicités sur tous les continents, mais cette fois le groupe prépare une grande tournée Africaine, dont le Sénégal.

 

 

 

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