Des poètes rendent hommage à Charles Carrère

Charles Carrère qui vient de disparaitre à l’âge de 91 était un des plus grands poètes de sa génération. Né à Saint-Louis du Sénégal, il fait partie des éminents penseurs de la négritude. Ce formidable ambassadeur de la culture s’est aussi distingué dans la peinture et il disait à ce titre : « Si ma plume est prompte, mes pinceaux sont lents. Peindre en définitive pour moi, c’est dire avec des couleurs ce que je ne peux dire avec des mots… » Charles Carrère a reçu plusieurs prix littéraires et notamment du prix Léon Dierx, attribué par la société des poètes français. Parmi ses oeuvres on peut citer Hivernage, Éd. l’Harmattan, 1999, Lettres de Gorée, Éd. Silex-ACTT, 1982, Océanes, NÉA, 1979.

Aujourd’hui, il repose dans le caveau familiale de sa terre natale. Des personnalités du monde lui rendent hommage.  Source: cenacleeuropeen.eklablog.fr

 

Amadou Lamine Sall, poète

« Un grand homme. Un grand monsieur. Un vrai poète, comme on les aime. Il était étincelant !

Charles Carrère:  quelle élégance ! Quelle allure ! Quel charme ! Quelle magie ! Quelle culture ! Il aura vécu, aimé de tous. Il était la poésie même ! La poésie n’est rien d’autre que la parole humaine quand l’homme en use pour le culte du Beau. Et le Beau ne peut naître que de l’Amour. Et c’est l’Amour qui a inventé l’Homme. Charles, c’était un pur amour.

Il a beaucoup contribué à cette civilisation de l’Universel et du Métissage dont parlait Senghor. Ce dernier était son ami. Je puis en témoigner. Ses deux filles, Fabienne et Sarah sont si divinement belles. Elles sont les enfants du métissage culturel entre la France et le Sénégal.  Charles a été un pont, une belle passerelle entre le monde et le Sénégal. L’Afrique, en un mot ! Oui, il portait ce continent non comme une blessure mais comme un phare de lumière et d’espérance. Sa poésie est traversée par ce chant millénaire qui monte du berceau de l’humanité.

J’étais le fils qu’il n’avait pas eu. Je le savais. Il m’a entouré d’une immense tendresse. Il a porté bien loin mon nom. Cette générosité est devenue rare. Le moi-moi est de mise, très souvent, dans les communautés littéraires. Beaucoup de vanité et d’orgueil  et peu de coeur ! Charles était généreux comme l’est Michel Bernard. Ce sont deux précieux échantillons que nous devons garder. Le monde des arts et des lettres a besoin de cette noblesse. La poésie, plus encore.

L’île de Corée où Charles  aimait  venir se reposer dans sa jolie maison bien fleurie sous les vents de l’Atlantique, lui manquera. Il était homme de la mer: Saint-Louis du Sénégal où il est né il y a 92 ans. L’île de Corée, son coin du coeur. Lannion, où il a fini ses jours.

Mon pays, notre pays, le Sénégal attend le corps de Charles pour le livrer non aux ombres, mais à la lumière. Il restera en nous et nous le chanterons longtemps, très longtemps encore. »

   Docteur Ndongo Mbaye ,Sociologue et Journaliste Poète-écrivain

« Bonsoir très chers amis de la Poésie et des Arts…

Je ne pleurerai pas Charles Carrère , non pas parce que mes larmes se sont taries , mais parce que c’était un homme de la Vie qu’il chantait et trimbalait comme son ombre , comme les Mots dont il aimait peindre ses univers, comme  ses diverses et variées curiosités artistiques qui faisaient le Bonheur de ses jours, les délices de ses nuits…

Charles était un homme polyphonique , qui rythmait tellement de sonorités, qui distillait tant de musicalités qu’il transformait, esprit magique , en autant de symphonies pastorales et insulaires…car l’eau l’a toujours accompagné dans ses nombreux voyages poétiques et picturaux, lui qui aimait les pastels gais , vivifiants , joyeux et savoureux qu’il aimait tant utiliser pour créer des mondes, ses mondes.

En pays mandingue, on le qualifierait de « homme du Temps jadis », non pas parce qu’il est « vieux », mais parce qu’il était porteur de valeurs intrinsèques , de culture et de civilisation , d’enracinement et d’ouverture sur la modernité…

Oui, je ne pleurerai pas Charles Carrère , parce qu’il a bien rempli sa Vie où trônaient au frontispice de son crédo, les mots »Plaisirs, Jubilation et Plaisir ».

Avec tes enfants, dont sarah ma grande amie et soeur, et toute ta famille, nous t’accompagnerons aux sons des trompettes , des saxos, de jembés et des bugarabus , pour danser , et danser et encore chanter et danser jusqu’aux dernières lueurs d’une aube aux frimas d’abondance…et de Liberté.

Michel Bénard Poète, peintre, essayiste, critique

 « Il dort sous sa pierre blanche

Dans la terre de ses enfants

Parmi les champs de mil et d’arachide.

C’est l’heure précieuse du souvenir

Par une nuit de claire lune,

De lumière aux mystères laiteux.

Les chants de l’élégie s’élèvent 

Lancinants, poignants, lents,

Aux rythmes répétitifs

D’une kora, d’un balafong et d’un khalam.

Ils en appellent aux esprits,

Ils implorent la Parole

Sage de l’ancien, 

Transmission du savoir.

Il repose sous sa pierre blanche

Dans la terre de ses enfants,

Où flottent des odeurs de cendre et d’encens,

Mêlées aux effluves de gongo

Que portent les femmes. »

Jeannine Dion-Guérin poète, animatrice de radio, comédienne, conférencière

 « ce parfait gentleman qu’était Charles Carrère et aussi de ce poète qui possédait toute la fougue et le goût des images africaines dans un style tempéré par sa riche culture francophone. »

Je relis toute son oeuvre et suis à nouveau surprise par l’élégance de son rythme poétique et de ses mots. »

Je pense à Sarah sa fille, excellente musicienne que j’ai entendu à Bruxelles, ainsi qu’à la seconde que je n’ai pas eu le plaisir de rencontrer. Je penserai à toutes deux la prochaine fois que je dirai « Femme nue femme noire ». J’avais eu la joie de réciter ce texte avec leur père. »

 

 

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