À la Libération, un contingent d’ex-prisonniers de guerre originaires de l’Afrique Occidentale Française (AOF) devait quitter le port de Morlaix le 5 novembre 1944 pour arriver le 21 novembre 1944 à la caserne de Thiaroye, en périphérie de Dakar, et y être démobilisés.
Selon la réglementation en vigueur (circulaire du 21 octobre 1944), les rapatriés devaient percevoir un quart de leur solde de captivité avant embarquement et les trois-quarts restants à Thiaroye. Près de 2000 ex-prisonniers de guerre devaient embarquer.
Des prisonniers de guerre d’un genre inédit, car ayant été détenus dans les camps dits « Frontstalags” installés par les Allemands sur le territoire Français occupé, et placés sous la garde de forces… Françaises.
Le 5 Novembre 1944, jour du départ du navire Britannique Circassia vers Dakar, 315 soldats Africains parmi les ex-prisonniers de guerre, refusèrent d’embarquer sans percevoir leurs soldes totales. Ces 315 soldats Africains, venus libérer la France, et furent parqués comme des bêtes à Morlaix, dans des espaces entourés de barbelés.
Ils y encoururent des traitements inhumains et dégradants, infligés par les forces françaises qui les gardaient. La commission d’un odieux crime de guerre s’ensuivit, et bien décrit par le journal l’Aurore, dans l’ article au titre évocateur suivant:
« 11 Novembre sanglant à Morlaix: cent gendarmes tirent sur des Sénégalais désarmés”.
Deux mille Sénégalais récemment délivrés de camps de concentration et groupés à Morlaix attendaient depuis quelques jours leur départ pour l’Afrique.
Après plus de quatre ans de captivité, leur arriéré de solde était très important, aussi en attendaient-ils le paiement avec fébrilité. La plupart furent réglés sauf 325 d’entre eux, cantonnés au quartier de la Madeleine.
Le jour du départ arriva et ces 325 infortunés refusèrent d’embarquer avant d’avoir été alignés en solde, disant qu’ils ne voulaient pas être dupes comme leurs pères, qui en 1918 après avoir versé généreusement leur sang pour la France, étaient rentrés au pays sans solde, que depuis ils attendent toujours.
Nos braves bamboulas restent inflexibles et inséparables dans leur résolution et le bateau partit sans eux. (…).
Vendredi, l’arrivée insolite d’un fort contingent de gendarmes harnachés et armés en vrais guerriers excita quelque peu la curiosité populaire. (…). Vers cinq heures du matin, l’attaque commença.
Des gendarmes pénétrant dans la bauge-dortoir intiment à tout le monde de sortir illico en joignant le geste à la parole empoignant les hommes en caleçon ou à demi vêtus pour les faire sortir de force.
Ce réveil surprise ne fût pas du goût des Sénégalais qui, les premiers moments de stupeur passés, comprirent le genre de brimades et de provocations dont ils étaient l’objet. (…) Tout à coup dans la nuit claqua un coup de feu. Ce fut le commencement du drame: qui avait tiré?
D’après la version officielle ce serait un Sénégalais? Mais nous nous refusons d’y croire, car ils étaient venus désarmés de leurs camps et ils ne possédaient que quelques baïonnettes-souvenirs dont ils n’avaient pas fait usage. (…) Ce fut la fusillade générale… Entre temps les maisons du voisinage furent assiégées par les gendarmes pour en faire sortir les Sénégalais que les habitants hébergent par charité (…). Triste aube du 11 novembre, disent les habitants de ce paisible et populaire quartier qui furent réveillés par le vacarme. »
Dans une lettre conservée précieusement par sa Marraine de Guerre en date du 14 Novembre 1944 le Tirailleur A.A, survivant de Morlaix avait écrit:
“J’ai de la chance de n’avoir pas été tué par les balles de mitrailleuses des gendarmes et FFI qui ont ouvert le feu sur nous durant la nuit. .. “Il y a plus de 10 jours que nous étions à Morlaix. Ils nous avaient dit d’embarquer sur le bateau, mais nous ne voulions pas partir sans paiement auparavant. Maintenant ils nous gardent comme des prisonniers de guerre. Nous couchons par terre, il fait froid, pas de couverture. Et ce sont les FFI qui nous gardent!”
Le rapport officiel des autorités françaises fit état d’un bilan de 7 blessés parmi les soldats Africains, mais l’ampleur de l’attaque, la violence des méthodes utilisées, le compte-rendu des media, et le témoignage écrit du soldat rescapé lui apporte une cinglante contradiction.
La même contradiction que sur les rapports officiels du massacre de Thiaroye 44, perpètre juste après les tragiques événements de Morlaix 44- lesquels avaient fait état de 35 morts, ramenés, des décennies plus tard à 70 morts par le President Francois Hollande en personne!
La condition de la levée de ce doute serait donc l’administration de la preuve irréfutable par la
France que tous les 315 soldats, détenus à Morlaix comme des prisonniers de guerre malgré la fin de la guerre, et malgré leur statut de soldats de l’armée française, a Morlaix, y compris les 7 blessés, avaient été tous payés et rapatriés vers leurs destinations finales en Afrique. À défaut, l’histoire devra retenir que le 11 Novembre 1944, alors que le navire Circassia transportait vers Thiaroye sa cargaison de victimes expiatoires/martyrs, une agressionr amée eut lieu à Morlaix, contre des soldats Africains, frères d’armes et ex-prisonniersd e guerre.
Cette agression armée nocturne sur des hommes en plein sommeil, suivie d’ actes de séquestration, de traitements dégradants et d’ humiliation constitue un crime de guerre et un crime de trahison, au sens du droit international.
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