Le Bureau des droits de l’homme de l’ONU s’est dit, mardi dernier, « profondément préoccupé » par l’évolution de la situation des droits de l’Homme au Sénégal après la mort d’au moins seize manifestants entre le 1er et le 3 juin dernier et voit « un sombre précédent » dans l’usage d’armes à feu par les forces de l’ordre contre des manifestants, a déploré le HCDH dans un communiqué.
Le Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’Homme (HCDH) a réclamé également une « enquête indépendante » sur la mort de ces manifestants. Les services du Haut-Commissaire Volker Türk ont pris note de la décision des autorités sénégalaises d’ouvrir des enquêtes, « nous demandons de veiller à ce que celles-ci soient rapides, indépendantes et approfondies », a déclaré lors d’une conférence de presse régulière de l’ONU à Genève, Seif Magango, porte-parole du HCDH.
Pour l’ONU, il s’agit de faire en sorte que toute personne reconnue responsable « d’un usage inutile ou disproportionné de la force rende des comptes, quels que soient son statut et son appartenance politique ». A ce sujet, le Haut-Commissariat s’est dit prêt à offrir l’assistance sur ces enquêtes.
Le HCDH déplore un « sombre précédent » dans l’usage d’armes à feu contre les manifestants
Le Sénégal a été en proie du 1er au 3 juin à ses pires troubles depuis des années après la condamnation de l’opposant Ousmane Sonko à deux ans de prison ferme dans une affaire de mœurs. L’annonce de la condamnation a déclenché des violences qui ont fait officiellement 16 morts, mais l’ONG Amnesty International estime à 23 le nombre de morts.
Pour sa part, le Haut-Commissariat évoque « au moins » 16 personnes tuées, 350 blessées et plus de 500 arrêtées lors de trois jours de manifestations, entre le 1er et le 3 juin.
Le Haut-Commissariat s’est également préoccupé par « la poursuite des restrictions » à la liberté d’expression et de réunion pacifique.
Depuis les manifestations du 3 juin, les autorités ont refusé d’autoriser au moins deux autres manifestations, dont celles prévues vendredi et samedi derniers. Pour l’ONU, il est de la responsabilité première des autorités sénégalaises de préserver le respect de longue date du pays pour les traditions démocratiques et l’État de droit.
Le HCDH demande donc à Dakar de garantir les droits à la liberté de réunion pacifique et d’expression, ainsi que le droit à l’information. Il s’agit aussi de veiller à ce que les journalistes puissent exercer leur profession librement et en toute sécurité, en particulier à l’approche de l’élection présidentielle de 2024.
Suspension de la chaîne privée Walfadjiri TV
« Nous sommes également préoccupés par la poursuite des restrictions à la liberté d’expression et de réunion pacifique à la suite des manifestations », a encore souligné le Haut-Commissariat.
Il évoque en particulier le cas de Walfadjiri TV, une chaîne privée qui couvrait les manifestations en direct et qui a été suspendue le 1er juin « sans justification légale claire et n’a toujours pas été rétablie à ce jour ».
Le gouvernement a également ordonné la suspension d’une campagne de financement par la foule destinée à soutenir le groupe de presse dakarois « pendant la période où il ne peut pas fonctionner », a ajouté M. Magango.
De plus, l’accès aux services Internet mobiles a également été restreint entre le 1er et le 6 juin. Pour l’ONU, les restrictions à l’accès à internet, qui avaient été justifiées par le gouvernement pour mettre fin à « la diffusion des messages haineux et subversifs doivent être fondées sur une loi sans ambiguïté et accessible au public ». « Ces restrictions doivent être nécessaires pour atteindre un objectif légitime, tel que défini dans la législation sur les droits de l’homme, et être proportionnelles à cet objectif légitime et non discriminatoires ».
Plus largement, le HCDH réaffirme sa volonté de continuer à travailler avec le gouvernement sénégalais, la société civile et d’autres partenaires pour renforcer la protection des droits de l’homme dans ce pays d’Afrique de l’Ouest.
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