Rami Abou : « Je vais vendre ma bibliothèque pour survivre »

Rami Abou Jamous écrit son journal pour Orient XXI. Ce fondateur de GazaPress, un bureau qui fournissait aide et traduction aux journalistes occidentaux, a dû quitter en octobre 2023 son appartement de la ville de Gaza avec sa femme Sabah, les enfants de celle-ci, et leur fils Walid, deux ans et demi, sous la pression de l’armée israélienne. Réfugié depuis à Rafah, Rami et les siens ont dû reprendre la route de leur exil interne, coincés comme tant de familles dans cette enclave miséreuse et surpeuplée. Il a reçu, pour ce journal de bord, deux récompenses au Prix Bayeux pour les correspondants de guerre, dans la catégorie presse écrite et prix Ouest-France. Cet espace lui est dédié depuis le 28 février 2024.

Lundi 25 novembre 2024.

Aujourd’hui, comme d’habitude, je suis monté dans la bétaillère qui sert de transport en commun, pour aller travailler à la Maison de la presse. Ce n’était pas un jour comme les autres. Il pleuvait et le vent soufflait fort. C’était une pluie modérée qui a duré deux ou trois heures, pas l’un de ces déluges qui peuvent durer une journée entière pendant l’hiver à Gaza. Mes compagnons de voyage se plaignaient pourtant et maudissaient la pluie. C’est la première fois de ma vie que j’entendais des Gazaouis protester contre l’eau qui tombe du ciel.

Ils avaient plusieurs raisons de le faire. Les passagers, comme moi, n’avaient aucun vêtement contre la pluie et le froid. Pour ma part, j’ai juste une petite veste légère. J’avais acheté une veste chaude l’hiver dernier, mais je l’ai perdue en fuyant Rafah de façon précipitée avec ma famille. La majorité des gens qui étaient là disaient : « Il faut que ça s’arrête ! » Ils en sont arrivés au point de prier Dieu de faire cesser la pluie.

Compter près de 2 000 euros la tente

Comme moi, toutes ces personnes vivent sous des tentes. Des tentes usées, abîmées à cause des changements de température, du vent et de tout ce qu’ils ont vécu. Aujourd’hui par exemple, alors qu’il n’a plu que quelques heures, c’était une véritable inondation. L’eau a envahi les tentes, les matelas étaient trempés. Le vent a emporté les bâches qui servaient d’abris de fortune, surtout sur la plage, où les rafales étaient les plus fortes. Les embruns se sont mêlés à la pluie pour que les gens soient encore plus trempés. Je n’arrive pas à décrire la situation, il faut vivre dans cet enfer pour comprendre la détresse de ces familles qui n’ont plus aucun toit pour abriter leurs enfants de la pluie et du vent, ni assez de vêtements, ni assez de couvertures, parce qu’on n’en trouve plus à Gaza.

Moi, j’ai de la chance. Récemment, nous avons reçu de France un petit sac avec des habits d’hiver, des joggings qui tiennent chaud. Walid a eu droit à un manteau. Du coup, sous la tente, ça va. Mais dès qu’on en sort, on est dans le froid et la pluie. Et encore, nous sommes des privilégiés, avec notre petit morceau de terrain, notre cuisine bricolée et nos toilettes « système D ». Mais les autres, qui vivent dans les camps de fortune, ils n’ont que des toilettes collectives, à parfois des centaines de mètres de leur tente. Lire la Suite ICI

 

 

 

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