Pascal Boniface: les Etats-Unis, un danger stratégique pour la planète

Les Etats-Unis peuvent-ils constituer un risque grave pour la sécurité internationale dans les 20 prochaines années ? Cette question posée par un chercheur invité, avec d’autres, à une sorte de brainstorming, sous la Présidence Sarkozy afin d’écrire un livre blanc sur la défense, est vite évacuée. « C’est une excellente question, mais ça serait gênant de poser un tel scénario » répond la personne chargée de coordonner le travail des experts devant conduire au fameux livre blanc. Celui qui raconte cette anecdote c’est Pascal Boniface Directeur de l’Institut de Relations Internationales et Stratégiques (IRIS) qui publie un nouveau livre: «Requiem pour le monde occidental. Relever le défi Trump» Editions Eyrolles.

La notion de monde occidental tend à devenir obsolète depuis l’effondrement du mur de Berlin. Du temps de la guerre froide ce monde occidental, opposé au bloc communiste était cohérent. Désormais, il faut oser regarder l’évolution du monde et penser davantage multipartisme. Aujourd’hui, la surévaluation de la menace russe, iranienne ou bien du terrorisme nourrit davantage l’hégémonie américaine.

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Le nouvel ouvrage du Directeur de l’IRIS

« Durant la guerre froide, le monde occidental, opposé au bloc communiste dont il craignait l’expansionnisme asservissant, était une entité géopolitique cohérente qui menait un combat justifié pour préserver sa liberté. L’OTAN et la dissuasion américaine ont su endiguer l’URSS et maintenir la paix sur un continent européen habitué à être déchiré par les guerres. À tout égard, il valait mieux être à l’ouest qu’à l’est du rideau de fer. Mais aujourd’hui, la notion de monde occidental est-elle encore pertinente ? Un moment de l’Histoire a pris fin, celui où le bloc de l’Ouest, avec ses qualités et ses défauts, correspondait à un ensemble géopolitique cohérent. Ce n’est plus le cas. Plutôt que de psalmodier le thème des valeurs occidentales, il ne faut pas avoir peur de prononcer son oraison funèbre, de bâtir autre chose, des alliances – sujet par sujet – sur la base du multilatéralisme » explique le résumé de l’ouvrage du Directeur de l’IRIS.

Seulement, l’hégémonie américaine est persistante. D’abord par la culture, la musique et le cinéma. Ce n’est pas pour rien que dés 1946, L’accord Blum-Byrnes prévoit la fin du régime des quotas, imposé aux films américains en 1936 et resté en place après la Libération. Byrnes, Secrétaire d’État des États-Unis souhaite un retour aux accords de 1933, qui prévoyaient un quota fixe de films américains par an projetés dans les salles françaises.  Par la culture donc, par les idées et la réflexion aussi. En effet, les Etats-Unis, grâce à un dense réseau de Think-Tank, de centres de recherches et de fondations, délivrent des bourses, invitent les chercheurs du monde à séjourner sur son sol et à échanger sur les grandes questions stratégiques. Dans ce climat de débat, de liberté, où même les Etats-Unis peuvent être critiqués, la plupart de ces chercheurs, pour ne pas dire tous, sont influencés et construisent, inconsciemment ou non, des schémas de réflexion pro-americain et qui ne servent au final que les intérêts américains.

De plus, les Etats-Unis dans leur unilateralisme manifeste, exercé et chanté, par le Congrès par exemple, peuvent exposer la planète à de gros problèmes, car pour lui, il y aurait un fossé abyssal entre la méconnaissance du monde de la part des élus américains et le poids gigantesque que représentent les Etats-Unis dans les affaires internationales.

« Les congressistes élus tous les deux ans n’ont pas le temps de s’occuper d’affaires internationales. Électoralement ce n’est pas rentable » pense Pascal Boniface.

Il s’agit dés lors, pour Pascal Boniface, sans developper un anti américanisme primaire, inviter plutôt l’Europe à s’émanciper de la dépendance vis-à-vis des Etats-Unis, en matière de stratégie et de réflexion sur le monde. Baser la réflexion sur les mêmes postulats que  du temps de la guerre froide est contreproductif.

Si on pousse la réflexion plus loin et vers l’Afrique, il est légitime de poser le même débat sur les relations entre les pays d’Afrique francophone et l’ancienne puissance coloniale. Le débat sur le FCFA, sur la coopération économique ou sur les accords de défense est plus que pertinent. Les réalités de 1960 date des indépendances ne sont plus celles de 2019.

 

Crédits: lejdd.fr

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