Le nouveau président est clair dans sa volonté de coopérer avec les États-Unis mais son pays restera indépendant sur la scène internationale. Source : Les Crises & Responsible Statecraft, Andre Pagliarini.
La cérémonie d’investiture de Lula le 1er janvier a suivi toutes les étapes traditionnelles prévues dans le cadre d’une passation de pouvoir pacifique depuis le retour de la démocratie à la fin des années 1980.
Les représentants qui sont venu pour participer à l’inattendu 3ème mandat de Lula, sans oublier ce que le nouveau chef d’état avait lui même à dire à propos de sa vision de politique étrangère lors de ses différentes prises de parole d’investiture, donne des indices sur l’évolution du rôle de la plus grande nation d’Amérique latine sur la scène internationale pour les années à venir.
L’indice peut-être le plus clair démontrant la volonté de Lula de marquer une rupture par rapport à son prédécesseur et de garder le Brésil en dehors du camp politique des États-Unis était l’accueil chaleureux qu’il a réservé autant au représentant ukrainien que russe. Avant son investiture, Lula a rencontré individuellement Valentina Matvienko, présidente du conseil de la Fédération de Russie, et la vice-première ministre de l’Ukraine Yulia Svyrydenko. Dans son post à propos de son rendez-vous avec Matvienko, Lula « l’a remerciée pour les salutations de Poutine et a exprimé le désir du Brésil d’une paix ainsi que de l’obtention d’un terrain d’entente pour les deux parties afin de mettre un terme au conflit. »
Il a reçu également de Svyrydenko les meilleurs vœux du président Volodymyr Zelensky ainsi qu’une mise à jour concernant la guerre avec la Russie. « Au Brésil, a-t-il souligné, nous avons une tradition de défendre l’intégrité des nations et nous allons échanger avec tous les acteurs possibles pour la paix. » Prises ensemble, ces déclarations offrent un aperçu de la manière dont Lula voit le conflit qui fait rage en Europe de l’Est et la politique étrangère plus généralement.
Il est clair que le respect de la souveraineté nationale sera un pilier important de la politique extérieure de Lula, que ce soit en Europe ou dans le monde occidental. En effet, Lula a souvent fait référence à la souveraineté nationale en dénonçant l’ingérence étrangère dans des pays comme le Nicaragua, Cuba et le Venezuela, même quand il a occasionnellement critiqué leur régime. En soutenant la souveraineté de l’Ukraine, Lula fait une remarque plus globale sur la non-intervention. C’est en accord avec ce que Celso Amorim, l’ancien chef de la diplomatie de Lula et plus important conseiller aux affaires étrangères, avait dit en mars dernier : « Je suis contre l’usage unilatéral de la force… Je ne peux pas condamner l’invasion de l’Irak par les États-Unis et accepter une autre invasion. »
Le fait que Lula ait reçu une délégation russe signale cependant son intention de garder les voies de communication ouvertes malgré le fait que les relations entre Moscou et Washington se soient considérablement détériorée ces dernières années.
La secrétaire à l’Intérieur des États-Unis Deb Haaland, qui avait critiqué le gouvernement de Bolsonaro avec véhémence pendant son mandat au Condrès, était à la tête de la délégation américaine. Elle a déclaré que représenter les États-Unis lors de l’investiture de Lula était « l’honneur d’une vie. En tant qu’ancienne membre du Congrès, » a-t-elle tweeté à propos de la cérémonie de prestation de serment de Lula « être le témoin d’une démocratie en action a été pour moi un honneur. L’investiture qui a lieu aujourd’hui est une étape passionnante dans le travail à venir pour les États-Unis et le Brésil afin de garantir que nos solides démocraties œuvrent pour le bénéfice de tous. » Il est difficile d’imaginer qu’un autre événement politique puisse unir et enthousiasmer des délégations de Russie, d’Ukraine, du Venezuela et des États-Unis.
Washington devrait reconnaître la nature exceptionnelle du Brésil de Lula et ne pas chercher à lui lui forcer abusivement la main sur des questions de politique internationale. Lula a su démontrer également son enthousiasme et ses compétences sur la scène internationale qui méritent un degré de latitude, sinon de déférence de la part des États-Unis dans ce nouveau contexte politique. La Suite ICI: les-crises.fr/lula-investi-au-bresil-le-debut-d-une-politique
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