« Je ne pensais qu’à moi-même en écrivant »

Camara Laye est un écrivain guinéen d’expression française né le 1er janvier 1928 à Kouroussa un village situé dans la région naturelle de la Haute-Guinée et décédé à Dakar (Sénégal) le 4 février 1980, à l’âge de 52 ans.  L’Enfant Noir Loin paru en 1953 est son premier ouvrage.  Il est aussi l’un des premiers romans Africains, écrits en langue française, à avoir eu un succès, ainsi qu’une reconnaissance en dehors du continent. Il est enfin devenu aujourd’hui un des plus grands classiques de la littérature francophone.

Loin de son pays natal, Camara Laye évoque dans ce récit autobiographique son enfance, la richesse et la chaleur de la culture africaine qu’il a dû quitter pour s’ouvrir à la modernité. 


« Je ne pensais qu’à moi-même et puis, à mesure que j’écrivais, je me suis aperçu que je traçais un portrait de ma Haute-Guinée natale » dixit Camara Laye.

Extrait du roman: « J’étais enfant et je jouais près de la case de mon père. Quel âge avais-je en ce temps-là? Je ne me rappelle pas exactement. Je devais être très jeune encore: cinq ans, six ans peut-être. Ma mère était dans l’atelier, près de mon père, et leurs voix me parvenaient, rassurantes, tranquilles, mêlées à celles des clients de la forge et au bruit de l’enclume. »

« J’ai fréquenté très tôt l’école. Je commençai par aller à l’école coranique, puis, un peu plus tard, j’entrai à l’école française. J’ignorais alors tout du fait que j’allais y demeurer des années et des années, et sûrement ma mère l’ignorait autant que moi, car, l’eût-elle deviné, elle m’eût gardé près d’elle; mais peut-être déjà mon père le savait-il…

Aussitôt après le repas du matin, ma sœur et moi prenions le chemin de l’école, nos cahiers et nos livres enfermés dans un cartable de raphia.
…l’idée de dissipation ne nous effleurait même pas; c’est aussi que nous cherchions à attirer le moins possible l’attention du maître: nous vivions dans la crainte perpétuelle d’être envoyés au tableau.

Ce tableau noir était notre cauchemar: son miroir sombre en reflétait que trop exactement notre savoir; et ce savoir souvent était mince, et quand bien même il ne l’était pas, il demeurait fragile; un rien l’effarouchait. Or, si nous voulions ne pas être gratifiés d’une solide volée de coups de bâton, il s’agissait, la craie à la main, de payer comptant. C’est que le plus petit détail ici prenait son importance: le fâcheux tableau simplifiait tout; et il suffisait en vérité, dans les lettres que nous tracions, d’un jambage qui ne fût pas à la hauteur des autres, pour que nous fussions invités, soit à prendre, le dimanche, une leçon supplémentaire, soit à faire visite au maître, durant la récréation, dans une classe qu’on appelait la classe enfantine, pour y recevoir sur le derrière une correction toujours mémorable.”

 

Crédits: leventdanslespages

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Mamadou Sekk est un passionné de culture et de musique africaine. Il est l'initiateur du Berger Des Arts (Gaynaako Ñeeñal) The Shepherd Of Arts et Festival Blues D'Afrique / Assoc. Le Berger Des Arts est dédié à la collecte, la conservation, la mise en valeur et l'interprétation des musiques du monde, sous-estimées ou en péril, qui ont contribué à la naissance du Blues afin d'éviter leur disparition.

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