Le Baobab a fêté ses 50 ans d’existence vendredi soir sur la scène de l’institut Français de Dakar. Devant un public venu nombreux (sold-out à 3 jours de l’événement), voir ces papy ou ce qu’il en reste et leurs jeunes pousses, le temps s’est arrêté pour rendre hommage à ce groupe de légende.
« La trajectoire du Baobab épouse celle du Sénégal indépendant » ce propos du professeur Ibrahima Wane dans le film « Baobab, une autre Histoire du Sénégal» du réalisateur Toumani Sangaré projeté avant le concert dans le cadre du cycle Dakar, Mon Amour, en dit long sur la place qu’occupe la bande à Thierno Koité, dans la marche de la nation sénégalaise.
Des années Senghor pendant lesquelles les politiques culturelles sont massives, à l’alternance de 2000 marquée par une volonté d’affirmation forte et d’estime de soi, en passant par l’arrivée au pouvoir de Diouf, les ajustements structurels, la crise casmancaise, la dévaluation du FCFA, Baobab est cœur de tous les tremblements du pays.
Abdoulaye Mboup, la première vedette à chanter en wolof sur des sonorités bien sénégalaises annonça ce qui allait se passer dans les années 80-90 avec les Thione Seck, Oumar Pene, Baaba Maal, Pape Djiby Ba, Ismaela Lo, Souleymane Faye, Cheikh Lo sans oublier évidemment Youssou Ndour et son mbalakh ravageur qui contribua, entre autres, à éteindre le Baobab, mettant fin à une époque.
Ce même Youssou Ndour, devenu star mondiale, participera au renouveau du Baobab lorsque vers la fin des années 90, le producteur anglais Nick Gold, à qui on doit la résurrection du Buena Vista Social Club et la diffusion mondiale d’artistes tels qu’ Ali Farka Touré, tombe sur un enregistrement du groupe dakarois et, est convaincu qu’il faut les remettre sur le circuit. Le résultat sera à la hauteur des attentes. « Le renouveau du Baobab a fait la légende du Baobab » dit, fort à propos, le journaliste Alioune Fall dans le biopic.
Aujourd’hui, le Baobab dont la musique n’avait pas accroché en Europe à la fin des années 70, arpente avec succès les scènes du monde. Les jeunes qui ont pris le relais sont entrés dans la peau des pères fondateurs avec brio. Mention spéciale au chanteur Papino, qui a fait étalage de tout son talent lors du concert. Il n’est pas évident de chanter, seul, du Ablaye Mboup, puis du Rudy Gomis ensuite du Balla Sidibé et enfin du Ndiouga Dieng. En ouvrant le concert hier par la mélancolique Utrus Horas, chanson signée Rudy Gomis, roi de la mélodie par exellence, Papino, a sans doute enlevé tout scepticisme à ceux qui ne suivent pas forcément le Baobab et qui pouvaient avoir un doute sur la capacité de la releve à reprendre certains classiques. Dés l’entame donc, il a mis tout le monde d’accord. Le public a vibré, chanté et dansé avec le lead-vocal, véritable boute-en-train, toute la soirée. C’est une sacrée performance surtout en l’absence de Korka la seule femme du groupe ! Le public en a eu pour son argent ! D’ailleurs, un spectacle de Baobab n’a pas de prix.
Bien sûr, on aimerait voir Assane Mboup, Alpha Dieng et autres au sein du groupe. Le Baobab, devenu un véritable label, est une formidable plateforme pour qui veut faire une grande carrière…
Le saxophoniste et leader du groupe Thierno Koité, le guitariste Yakhya Fall et le batteur Mountaga, en bons témoins de l’histoire, l’experimenté Moussa Cissokho aux tumbas, en ont vu d’autres, tellement ils ont vécu des succès indescriptibles au cours de leur riche carrière. Toutefois, ils ne semblent nullement blasés. Les années passent et ils sont toujours aussi énergiques et passionnés…toujours aussi jeunes.
Quant aux jeunes de la bande justement, on peut dire, sans nous tromper, qu’Attiso doit être fier de Boléro son heritier. Que dire du saxophoniste Zinsou, un Issa Cissokho en puissance dans le jeu comme dans la présence scénique. Enfin, Malick Sy à la basse…non seulement, il succede parfaitement à la légende Charlie Ndiaye, mais il apporte, lui le féru de jazz, un groove qui donne une couleur moderne à la musique du Baobab.
Le Baobab fêtera l’année prochaine ses…50 ans. Encore? L’incomparable maitre de cérémonie Top, l’a rappelé à un public conquis: » Un Baobab ne meurt jamais ».Sous la guidance de leur manager Badou Beye, discret mais ho combien rompu à la tâche, le Baobab reste un éternel jeune…de 50 ans.
Laisser un commentaire