LANGUE ET POLITIQUE

Khadim N’diaye Pour commémorer le décès de Cheikh Anta Diop, un symposium a été organisé jeudi 7 février 2019 à l’Université Laval à Québec (la ville, et non pas la province. 230 km de Montréal).

Des spécialistes venant de plusieurs disciplines seront réunis pour discuter des différentes facettes de son œuvre, de son actualité et des enjeux qu’elle pose.

Je traiterai, si tout se passe bien, de la problématique des langues africaines dans son œuvre.

La campagne électorale au Sénégal me servira de porte d’entrée.

Pour ceux qui suivent cette campagne électorale, avez-vous remarqué que tous les candidats sont devenus des disciples de Cheikh Anta Diop ?

Ils s’adressent aux populations dans la ou les langues qu’elles comprennent.

Je considère d’ailleurs mon ami Macky Sall comme le plus grand disciple de Cheikh Anta Diop en ce moment. Il a commencé à l’être bien avant d’ailleurs. À la veille de la campagne, il avait exhorté les membres de son équipe à parler de son bilan aux populations… dans leur langue.

On peut voir donc que quand les politiques sollicitent des votes et veulent que les populations prennent connaissance de leur programme, ils privilégient les médiums locaux. Ils considèrent donc implicitement que c’est plus efficace pour les atteindre.

Pourquoi alors, si c’est plus efficace, les lois, le code de la route et autres textes importants ne sont pas enseignés ou communiqués dans ces langues ?

L’Afrique est le seul continent où l’école est déconnectée de la vie quotidienne. La grande majorité des enfants y commence l’école en utilisant une langue qui n’est pas celle qui est parlée à la maison.

Cheikh Anta Diop était visionnaire. Il écrivait ceci : « Quand nous voulons nous adresser efficacement au peuple africain pour un but éducatif quelconque, nous ne tarderons pas à réaliser la nécessité de recourir aux langues africaines ».

Pour lui, dès que les messages des politiques et les textes régissant le pays dans tous les domaines sont compris, « du jour au lendemain », disait-il, les neuf dixièmes de la population deviendront des agents actifs du développement, des producteurs très utiles, au lieu d’être une masse passive à la remorque d’une minorité sans idéal ».

Je considère donc que tout politique doit inclure le volet « langue » dans son programme de développement, parce qu’il n’y a rien de pire qu’une élite en déphasage complet avec les populations qu’elle compte administrer.

Crédits: I Love Sénégal

Share

Khadim Ndiaye est philosophe, historien et éditeur sénégalais. Membre du Collectif contre la célébration de Faidherbe, il travaille beaucoup sur les questions de mémoires et celles qui touchent au fait coloniale. Grand militant des langues nationales, Khadim est auteur de: "Le français, la francophonie et nous". Les analyses de ce disciple de Cheikh Anta Diop, élève de Boris Diop et de Souleymane Bachir Diagne sont sur Kirinapost.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *