Samedi 31 mai , pendant que le PSG massacrait l´Inter de Milan, Jules Bocandé marquait un but très important, pour la culture sénégalaise à Neuchâtel lors de la troisième journée du festival International de Films d´Afrique et de la Diaspora (FIFAD).
« Essamaye – la panthère », au FIFAD. Zal Saliou Ndiaye et Maky Madiba Sylla
Le film « Essamaye – Bocandé » du réalisateur Maky Madiba Sylla et Lionnel Bourqui fut projeté au troisième jour du festival, le jour du sacre européen du PSG.
Le film nous apprend (entre autres choses) qu’en 1986 le PSG champion de l’hexagone avait recruté Jules Bocandé meilleur butteur du championnat de France d’alors pour maximiser ses chances de remporter le trophée des clubs champions d´Europe.
Bocandé avait fait un très long périple avant d’arriver sur les bords de la Seine. Élu meilleur jeune footballeur en 1974, il sera définitivement exclu du football sénégalais en 1980 á l’issue de la finale de la coupe du Sénégal (JA – Casa Sport) pour avoir donné un coup à l’arbitre Bakary Sarr. C’est ainsi qu’il atterrit à Tournai une équipe de troisième division belge, avant de rejoindre Seraing une formation qui fera un dépôt de bilan á la fin de l’année.
Le FC Metz et son Président Carlo Molinari (que Bocandé appelait papa) le feront venir en France où il deviendra le meilleur butteur du championnat. Il ne fera qu’une seule année à Paris avant de rejoindre Nice. Il terminera sa carrière au FC Lens en 1992.
Deux ans après il sera nommé entraineur de l’équipe nationale du Sénégal à côté de Boubacar Sarr Locotte. Il reviendra six ans après sur le banc de l’équipe nationale pour épauler Bruno Metsu et Abdoulaye Sarr, grâce à El Hadj Malick Sy à la tête de la Fédération Sénégalaise de football.
Mais c’est un jour de 1er Septembre 1986 que l’homme devint et pour toujours une légende. Le Sénégal qui était resté dix huit ans sans participer à une phase finale de la Coupe d´Afrique de la Nation, devait impérativement battre le Zimbabwe en match retour pour se qualifier. On fit appel à l’enfant banni, qui à l’issue du match, pour avoir marqué trois buts, devint le Messi qui permit au pays de renouer avec la haute compétition en Afrique.
La vie de « essamaye – panthère en Dioula» n’a pas été un long fleuve tranquille. Orphelin de père dès l’âge de quatre ans, il a reçu une éducation très stricte de la part de sa mère qui ne voulait pas du tout entendre parler de football à la maison. Pour elle le football était une activité de voyou. « Les Bocandé sont une grande famille, il n’est pas question que tu deviennes le premier voyou de cette famille », disait-elle. Le reste appartient à l’histoire
Bocandé est parti de ce bas monde en 2012, avec un très grand regret, celui de n’avoir pas pu offrir la CAN au Sénégal. C’est pourquoi le clou du film de MaKy Sylla, devient le pénalty de Sadio Mané qui fit du Sénégal le champion d´Afrique pour la première fois. Comme par une curieuse ironie de l´Histoire Sadio Mané dont le père aussi ne voulait pas du tout voir son fils jouer au foot, devient comme une sorte de réincarnation de Bocandé. Ils sont tous les deux originaires de la casamance, et tous les deux ont marqué de leur empreinte indélébile les annales du FC Metz. Et Sadio Mané réalisa en Février 2022 le rêve de Bocandé. Dix ans après son décès en donnant au Sénégal sa première étoile sur son maillot.
En filigrane, le propos du film « Essamaye » reste essentiellement : « Bocandé était un grand amoureux ». Il tenait toujours à exprimer son amour par tous les moyens, et dans n’importe quelle circonstances. Le football n’était finalement qu’un simple moyen pour lui d’exprimer son amour inconditionnel á sa femme, à ses enfants, à sa casamance natale, à son pays, à sa race, à tout ce qui est appréciable chez l’être humain.
Il eu une fois à abreuver l’arbitre d’une rencontre d´´injures, pour que celui-ci lui donne un carton rouge. Il le remercia tout de suite pour l’avoir exclu, avant de lui expliquer que c’était le seul moyen pour lui d’être libre de tout engagement vis à vis de son club qui ne voulait pas le libérer pour aller jouer pour le Sénégal. Sa femme dira : « Jules ne savait pas dire non, dès qu’on le sollicitait, il n’hésitait pas, il donnait sans compter». Et ses enfants : « c’est lors de ses obsèques au vu de la réaction des gens et de l’immensité de la foule, que nous nous rendîmes réellement compte de l’envergure réelle de ce Monsieur. Sinon tant qu’il était en vie, il était juste un père de famille comme n’importe quel père de famille pour nous ».
Des soldats du mouvement séparatistes le MFDC, qui vivent reclus dans la forêt avaient tenus à déposer les armes pour venir se joindre à l’énorme foule qui accompagnait Bocandé pour son repos éternel. Il faut savoir que Jules a aussi fait tout ce qu’il a pu pour le retour définitif de la paix en Casamance.
Avant la projection du film « essayage – Bocandé », un autre film du même réalisateur (co-réalisé aussi avec Lionnel Bourqui)
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