« Congo, un médecin pour sauver les femmes », Le film de Angèle Diabang garde toute sa vitalité onze ans après sa sortie

« Congo, un médecin pour sauver les femmes », Le film de Angèle Diabang garde toute sa vitalité onze ans après sa sortie.

« Congo, un médecin pour sauver les femmes », Le film de Angèle Diabang garde toute sa vitalité onze ans après sa sortie, Information Afrique Kirinapost

« À ce jour (à notre connaissance) c’est la seule production (cinématographique) d’envergure faite par un(e) africain(e) et consacré au Dr Mukwege prix Nobel de la Paix en 2018 » R

Lors de ma rencontre avec Monsieur Roger Buangui Puati* pour préparer la projection, du film de Angèle Diabang : « Congo, un médecin pour sauver les femmes » dans notre ciné-club à Lausanne, je lui ai demandé pour démarrer notre entretien ; que pensez-vous du travail de Angèle ?

Il m´a dit : « à travers Angèle Diabang, j’entends Lumumba, quand celui-ci disait – « L’histoire dira un jour son mot, mais ce ne sera pas l’histoire qu’on enseignera à Bruxelles, Washington, Paris ou aux Nations-Unis ; mais celle qu’on enseignera dans les pays affranchis du colonialisme et de ses fantoches. l’Afrique écrira sa propre histoire et elle sera, au nord et au sud du Sahara une histoire de gloire et de dignité ».

C´est exactement ce que Angèle a fait, – raconter une histoire de gloire et de dignité – , par ce film documentaire réalisé plus de dix ans avant le biopic produit par Angelina Jolie et réalisé par Marie-Hélène Roux (sortie en septembre 2025).

À ce jour (à notre connaissance) c’est la seule production (cinématographique) d’envergure faite par un(e) africain(e) et consacré au Dr Mukwege prix Nobel de la Paix en 2018 et quatre ans avant sa consécration par l’académie suédoise.

Le film est dur, très dur, mais il ne fait que refléter la partie visible de l’iceberg. L’Est du RDC est considéré comme la capitale mondiale du viol. Le viol y est érigé en arme de destruction massive. Le Dr Mukwege a soigné des centaines de milliers de victimes. Il a inventé un modèle basé sur quatre piliers : physiologique (soins du corps), psychologique : (soins apportés au psyché), juridique (la reconnaissance et la protection des victimes), économique : (l’autonomisation financière des victimes). Ce modèle est appliqué depuis dans toutes les zones de guerre dans le monde, en Iraq, en Syrie, en Colombie. Parce que faut-il le rappeler, le viol n´est pas un apanage des guerres intestines du Congo, c’est une arme que tous les peuples de toutes les races de tous les temps ont utilisée depuis toujours.

Dans les cinq premières minutes du film, où voit des visages de femmes jeunes et moins jeunes, sur lesquels, on ne peut lire que désolation, tristesse, affliction, chagrin et traumatisme. C’est quand apparait le Dr Mukwege qu´apparait avec lui une semblable de vie normale, dans cet hôpital de Panzi qu il a fondé pour soigner les femmes victimes de viol. Ces cinq premières minutes sont le condensé de tout le déroulé du film qui est construit dans un bel enchainement d’alternances de séquences de différentes natures. Successivement on verra les femmes victimes se soutenir et raconter leur viol et le calvaire qu´est devenue leur vie depuis dans une société pas toujours prête à les accepter, à les soutenir.

Les témoignages et analyses des autres femmes qui travaillent avec le Dr constituent des pans entiers et importants du film. La parole de ces femmes est tellement juste, poignante, intelligente, pertinente, et percutantes, qu´à un certain moment au beau milieu du film, j’ai dû me ressaisir pour me rappeler que c´est l´héroïsme du Dr Mukwege que ce film met en scène, quand celui-ci réapparait après quelques minutes d’éclipse.

Ceci à mon sens, témoigne de deux faits : 1) le film est bien pensé, bien amené, et bien aéré. 2) l´humilité du Dr et son leadership naturel, qui loin d´être encombrant donne tout l’espace nécessaire à ses collaboratrices et collaborateur. C’est cette attitude d’un vrai leader qui avait poussé selon M. Roger B Puati beaucoup de leurs compatriotes de la diaspora (lui en tête en Suisse) à ‘‘forcer’’ le Dr Mukwege à se présenter aux élections présidentielles au Congo en 2023.

Les victimes parlent de leurs souffrances de manière déchirante, le personnel analyse le contexte, amène la genèse, dénonce les coupables, et tente de dégager des perspectives pour pour le Congo, pour les Congolaises et les Congolais qui n’ont que trop souffert depuis trop longtemps. À leurs voix, vient se mêler celle de Ablaye Cissokho pour la musique du film. Il chante en wolof accompagné par les notes de sa kora. La kora cette instrument emblématique de l’Afrique de l’ouest, comme si Angèle voulait descendre au Congo pays de la rumba avec tout l´ouest de l’Afrique avec elle à travers toute la majesté de cet instrument.

Le seul bémol que je mettrai, serait le fait qu’Angèle ait confié sa voix à une autre pour la voix-off. Un fait qui en plus de nous priver de tout ce qu’on pourrait recevoir de ses émotions et ressentis, à travers ses trémolos, ses hésitations, et la gravité de sa voix, donne vaguement aussi au film un air de compilations d’articles de journal télévisé.

Le film reste un bel hommage à notre humanité, à travers ses protagonistes, hommes et femmes qui au péril de leur vie expriment ce que devient le point culminant de cette humanité quand celle-ci décide de ne rien céder à la barbarie, à la peur, au pessimisme, et au défaitisme, même au cœur du plus grand chaos.

* Roger Buangui Puati est un écrivain, pasteur et théologien congolais qui réside en Suisse depuis 1987, il est un grand ami du Dr Mukwege.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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