« Condamnez-vous le Hamas ? »(Par Rami Abou Jamous)

Rami Abou Jamous fondateur de GazaPress, fait partie des dix finalistes du prix Bayeux pour les correspondants de guerre. Il écrit son journal pour Orient XXI  depuis le 28 février 2024.

Son bureau fournissait aide et traduction aux journalistes occidentaux. Il a dû quitter en octobre son appartement de la ville de Gaza avec sa femme Sabah, les enfants de celle-ci, et leur fils Walid, deux ans et demi, sous la pression de l’armée israélienne. Réfugié depuis à Rafah, Rami et les siens ont dû reprendre la route de leur exil interne, coincés comme tant de familles dans cette enclave miséreuse et surpeuplée.

Mardi 8 octobre 2024

Le 7 octobre, j’ai été sollicité par de nombreux médias français et francophones, radios, télévisions, presse écrite, qui voulaient entendre une voix de Gaza. Je leur ai raconté la souffrance des Palestiniens de Gaza depuis le 7 octobre, les massacres, les boucheries, l’humiliation, la famine. Gaza, c’est l’enfer sur terre.

Dans le cadre de ces sollicitations, j’ai participé à un débat sur une chaîne de télé. Il y a beaucoup de choses que je n’ai pas pu dire, ayant passé les quelques minutes qui m’étaient allouées à répondre aux mêmes injonctions : « Condamnez-vous le Hamas ? »

Une participante du débat, que je ne connais pas, militante d’une organisation juive1, qui avait pu s’exprimer longuement dans la première partie de l’émission, accusait les Palestiniens de « toujours chercher à contextualiser le 7 octobre » qui, selon elle, n’avait donc rien à voir avec les 75 années précédentes. Elle s’est dite attristée de voir que « des voix venant de Gaza », en faisant allusion à moi sans le dire directement, ne voulaient pas condamner le 7 octobre. Parce qu’à Gaza, affirmait-elle, « on ne peut pas critiquer le Hamas par crainte de représailles ».

En veux-tu à ton frère, ou au voisin qu’il a frappé ?

Je ne défends pas le Hamas. Mais je crois que quelqu’un qui n’a pas vécu une occupation ne peut pas comprendre. La question de savoir si on condamne le Hamas, Moshé Dayan, alors chef d’état-major de l’armée israélienne, y avait répondu en son temps, comme je l’ai dit dans la dernière chronique de mon journal sur Orient XXI. Le Hamas n’existait pas à l’époque, mais Dayan parlait des résistants palestiniens armés. Pour lui, il était normal que des gens à qui on avait pris leur terre cherchent à se défendre. Et ma réponse à moi, c’est de dire : si ton frère a poignardé ton voisin qui vous a tout pris, votre maison, votre jardin, et qui vous a ensuite tous enfermés dans un petit morceau de terrain, et tué ta mère, tes frères, tes sœurs… est-ce que tu en veux à ton frère, ou au voisin qu’il a frappé ? C’est grave qu’on en soit arrivé à ne pas voir la réalité. Lire la Suite ICI

 

 

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