Adama Gaye • Emprisonné parce que critique, emprisonné parce qu’il a alerté, averti et dénoncé, Adama Gaye est la preuve que le Sénégal, jadis plébiscité comme une démocratie majeure, est devenu un pays où les libertés sont menacées. Ici, le journaliste jette un Regard critique sur le code de la presse avec des propositions & exemples (France et États-Unis)…
Qu’ils sont nuls, faibles!
La principale revendication du Syndicat des journalistes sénégalais a été une fois encore l’adoption d’un Code de la Presse. A nouveau, ils l’ont affirmé aussi bien pendant la fête du travail, Le 1er Mai, qu’à l’occasion de la journée de la presse, le 3 Mai.
Cela semble tomber bien. Puisque cette aspiration maintes fois déclinée correspond à la volonté de ce régime, tout illlégitime qu’il soit, qui en a fait, du reste, l’épine dorsale de sa politique de communication envers les professionnels de cette industrie.
Permettez, hélas, que je gâche la fête. Je me vois au regret de dire tout le mal que je pense de ce consensus dont l’apparente bienveillance paraît difficile à démolir sans courir le risque d’être accusé de nihilisme.
J’assume ! Et donc je dis: ce Code est une…connerie. Une affaire du passé, symbole de l’immobilisme intellectuel qui paralyse la presse au Sénégal.
Copié sur le mode du Code de la presse instauré en France en 1881 puis revu, un siècle après, en 1981, lors des Lois Fillioux, du nom du Ministre de la Communication d’un François Mitterand qui venait d’arriver au pouvoir, les deux Codes français, réunifiés, visaient, d’abord, à organiser un métier émergent au 19eme siècle, puis à empêcher les concentrations des titres, voire des groupes monopolistiques multi-media, par le boulimique Robert Hersant et l’industriel Francis Bouygues. Accessoirement, la mouture Fillioux aménageait un espace pour les radios privées, comme NRJ, qui venaient de naître. Elle préparait l’explosion médiatique pluriforme que l’on voit à présent. Ce fut un projet visionnaire.
Depuis lors, le métier de la presse dépasse, en effet, les confins de l’écrit. Un Code ne peut qu’être restrictif dans ces conditions. C’est pourquoi ce n’est qu’en France qu’on en entend parler -de moins en moins d’ailleurs !
Aux États-Unis, pays le plus avancé sur les questions touchant au journalisme et à la communication de manière générale, on ne se fourvoie pas dans une bataille pour un Code forcément bureaucratique.
Le problème est réglé par un acte législatif simple mais d’une imparable puissance: le premier Amendement de la Constitution américaine porte sur la liberté d’expression. Tout est là, et ça suffit. Le reste est entre les mains des pairs, dans une profession qui tient à son intégrité comme à la prunelle de ses yeux.
Toute faute professionnelle élimine le fautif. La règle du marché s’applique impitoyablement. À tous!
Souvenez-vous comment Peter Arnett, le journaliste héros de la première guerre du Golfe, s’est retrouvé démis de CNN, parce qu’ayant flanché une fois professionnellement. Dan Rather, le très emblématique présentateur du Journal Télévisé de CBS, Brian Williams, celui de NBC, ou Matt Lauer, grand animateur d’une tranche matinale fort suivie ont tous aussi été passés à la trappe par leurs pairs et le public, dès qu’ils sont sortis, même brièvement, des clous déontologiques.
Il y a certes un tribunal des pairs au Sénégal -le Cored- et un Synpics, le syndicat des journalistes. Les rires plats face aux pouvoirs, leurs relations adultérines avec ces derniers, leur silence sur les écarts de leurs membres, pires insulteurs et diffamateurs, sont autant de raisons de ne pas croire en eux.
Et cette propension à revenir ad nauseam sur ce Code de presse obsolète avant sa signature confirme leur propre passéisme.
Franchement, à l’heure où le journalisme est l’affaire de tout le monde, que des métiers nouveaux émergent dans son écosystème tandis que d’autres en sont disruptés, il est temps de sortir de la zone de confort des idées reçues, pour mettre en place les institutions conformes, à notre temps et à l’avenir.
En un mot, au lieu d’un Code de presse, le Sénégal a besoin d’une Commission de Régulation de la Communication (CRM) entendue comme instance couvrant la presse écrite, l’audiovisuel, la publicité, le marketing, l’internet. En la faisant valider par un acte législatif qui lui donnerait l’onction démocratique, elle deviendrait l’institution respectable chargée de veiller sur -et envisager- le statut des médias en tous genres et le rôle de leurs publics, de la société, de l’Etat…
Elle pourrait avoir des sous groupes censés faire la police des secteurs ici identifiés et d’autres qui pourraient l’être.
Mais un préalable: il faut trouver les honnêtes et capables professionnels et une justice digne de confiance si jamais devait se réaliser le saut qualitatif indispensable au sauvetage d’une profession moribonde et prise d’assaut par des virus de toutes sortes.
Nous revenons à la case départ: l’illégitimité et l’incompétence de la bande des truands, Macky et ses excroissances jusque dans les médias! Nullité Fepp, sans le savoir c’est PIRE !
PS: En voyant, tête penchée, dans un acte de soumission, le niais sourire du Secrétaire général du Synpics à côté de Mickey, pendant la fête du travail, je me suis senti mal à l’aise. Qui peut compter sur lui pour comprendre encore moins défendre avec finesse les complexes enjeux des métiers de la communication ? Je crains en outre une rase collusion, bang !
Plus grave la presse sénégalaise ne parle pas des scandales ni des enjeux sérieux concernant le pays mais ce syndicat n’en n’a cure !
Enfin, requiem, hier pour les dames de compagnie devenues drames de compagnie, damnées du Maquis, et qui font profil bas après avoir été parmi les bouledogues du voleur et fraudeur Macky ! Qui se souvient de ces grandes gueules, aujourd’hui condamnées au silence, silence humiliant pour des individus qui se posaient en parangons de la vertu mais n’étaient que des pique-assiettes ! Des noms ? Pas la peine: ils sont morts, des zombies…
3 Mai 2019: macabre journée de la presse, je vous dis ! Code de la presse: Tuez-le!
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