Abdoulaye Diallo, épitaphe qui coule de source : Le précieux berger de l’île

L’île de Ngor vient de perdre son berger. Abdoulaye Diallo, l’ingénieur devenu artiste iconique et une des lumières du Dakar culturelle a tiré sa révérence.

Abdoulaye Diallo, épitaphe qui coule de source : Le précieux berger de l’île, Information Afrique Kirinapost

Abdoulaye Diallo (1952-2025)

Le chant de l’espace le soir et le murmure de l’eau tôt le matin sur l’île pleureront la disparition d’Abdoulaye Diallo pour qui sait écouter. C’est lui qui nous avait appris à tendre l’oreille afin d’écouter cette immensité qui est l’océan et ce qui l’entoure.

Président de l’Association des Amis de Ngor, le berger de l’île n’était pas seulement un nom de scène, un nom d’artiste. Il était le gardien de l’île. Il luttait continuellement en faveur de la protection de l’environnement de Ngor. Son engagement pour lutter contre la prostitution, mais aussi en faveur de la préservation de la qualité de vie sur l’île, notamment son assainissement, était connu de tout le monde.

Avec sa disparition, l’île perd un pilier solide. Le Sénégal, un digne fils et l’art perd un précieux bienfaiteur.

Né en 1952 à la Médina, Abdoulaye Diallo, ingénieur des Télécoms, se passionne pour les arts. À sa retraite, il commence une seconde vie autour de la culture. Il installe son écrin dans sa maison rouge de l’île en 2011 et plonge dans l’univers des toiles et des pinceaux.

Les tableaux d’Abdoulaye Diallo racontent la vie, sa vie, ses rencontres, ses voyages, ses combats, ses réflexions, ses doutes. À travers l’art, il s’ouvrait de nouveaux horizons. Dans Bukki Teuf, le film du réalisateur Papalioune Dieng qu’il appelait affectueusement :«mon précieux neveu», il raconte avec humilité comment des artistes comme Bouna Medoune Seye l’ont encouragé et appris à mieux peindre, lui apportant à lui l’autoditacte, ces petits rien, qui font passer un cap.

Au fil des ans, d’expo en expo, son antre était devenu un lieu de débats, un espace de paroles et de rencontres de tous les arts. Artistes, universitaires, littéraires, étudiants, frequentaient régulièrement son atelier. Toujours disponible, toujours en quête d’échange et de partage, il laissait sa porte ouverte à tout venant guidé par l’humain.

Abdoulaye Diallo laisse une empreinte indélébile sur la vie artistique dakaroise, sénégalaise et africaine. Son atelier a grandement contribué, à l’image de son voisin Kër Yaadikoone de l’infatigable Alassane Na Samb, à renforcer et rehausser la place culturelle de l’île de Ngor.

Homme d’une profondeur extrême, il me fut présenté par mon oncle feu Amadou Mactar Diop, frère de ma tante Nabou celle qu’Abdoulaye Diallo appelait : «ma précieuse soeur».  «Tu connais notre cousine Khady Ndaw ? Leurs deux maisons familiales sont côte à côte à Castors» m’explique l’oncle. Notre première rencontre a lieu donc un après-midi, il y a bien longtemps devant chez lui à Amitié 2.

Après les salamalecs, il s’excuse, rentre dans la maison et ressort un ouvrage qu’il venait d’écrire sur la vie de l’homme politique Babacar Niang leader du PLP. C’est dire, s’il était multicasquette. Nous parlons politique,  société, mémoire et je découvre la densité de l’homme. Il nous parle de son nouveau refuge sur l’île et nous invite à lui rendre visite.

Quelques années plus tard, lorsque mon oncle Mactar tomba malade, il nous recommanda de l’amener aux séances d’aquagym du club des Dauphins du professeur Ndiambé Samb à Ngor. Un endroit magique et miraculeux pour tous les malades…c’était un être de lumière !

Nous ne rations jamais l’occasion de passer le voir. «Mon précieux neveu». Il nous accueillait toujours ainsi. Il savait accueillir son hôte. Abdoulaye Diallo avait de la classe. Son visage lumineux renvoyait à la clarté et à la sagesse. Profondément croyant, il avait une vie extrêmement pieuse. Son rapport à la foi était un rapport de tous les instants.

Ce départ si brusque a surpris le monde culturel mais lui l’a toujours attendu avec dignité sans jamais renoncé à la vie. Parti dans la nuit du jeudi au vendredi sur la pointe des pieds, il est allé se reposer comme il a toujours vécu avec noblesse et honneur tel un enfant gâté du ciel.

À sa famille, ses voisins des Amitiés, Castors, ( voisin depuis 1955 de mon oncle Alassane Ndaw) et de l’île de Ngor, Isabelle notamment, à tous ses amis, nous présentons nos condoléances et prions pour le repos de son âme…

 

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