« D’une prison à ciel ouvert, à une cage à ciel ouvert »(Rami Abou Jamous)

Rami Abou Jamous écrit son journal pour Orient XXI. Ce fondateur de GazaPress, un bureau qui fournissait aide et traduction aux journalistes occidentaux, a dû quitter en octobre 2023 son appartement de Gaza-ville avec sa femme Sabah, les enfants de celle-ci, et leur fils Walid, deux ans et demi, sous la menace de l’armée israélienne. Réfugiée depuis à Rafah, la famille a dû ensuite se déplacer vers Deir El-Balah et plus tard à Nusseirat, coincés comme tant de familles dans cette enclave miséreuse et surpeuplée. Un mois et demi après l’annonce du cessez-le-feu, Rami est enfin de retour chez lui avec sa femme, Walid et le nouveau-né Ramzi. Pour ce journal de bord, Rami a reçu le prix de la presse écrite et le prix Ouest-France au Prix Bayeux pour les correspondants de guerre. Cet espace lui est dédié depuis le 28 février 2024. Source: Orient XXI

 

« D’une prison à ciel ouvert, à une cage à ciel ouvert »(Rami Abou Jamous), Information Afrique Kirinapost

Khan Younès, le 17 avril 2025. Un garçon récupère de la farine après une frappe israélienne sur un abri de tentes. L’agence de défense civile de Gaza a déclaré le 17 avril que des frappes aériennes israéliennes avaient touché plusieurs campements de civils déplacés, tuant au moins 25 personnes ©Eyad BABA / AFP

Mardi 15 avril 2025

Cela fait plus de 45 jours que nous sommes sous blocus total, hermétique. Rien ne passe, ni importations du secteur privé ni aide humanitaire. Le 18 mars, Benyamin Nétanyahou a violé l’accord de cessez-le-feu et repris la guerre avec des violences et des massacres jamais vus. Je voudrais vous parler de ma vie quotidienne dans cette grande cage avec la continuation de ce génocide.

La bande de Gaza était une prison à ciel ouvert. Aujourd’hui, c’est une cage à ciel ouvert. D’après les déclarations du ministre de la guerre israélien, Israël a annexé à peu près 30 à 35 % de la bande. Chaque jour, l’armée d’occupation annonce de nouvelles zones à évacuer.

Si on quitte la route d’un seul mètre

Dans cette cage, on ne meurt pas encore de faim, mais la malnutrition devient une réalité. On peut encore trouver quelques légumes, des concombres, des tomates, parfois des laitues, des oignons, quelques courgettes. Ces légumes sont rares et chers, à cause notamment de la difficulté de leur acheminement. Il reste, au moment où j’écris, une seule route qui relie le sud au nord : la route Al-Rachid, qui longe la Méditerranée. Elle est interdite aux voitures et aux motos, il faut la parcourir à pied ou en charrette tirée par un âne. Pas de checkpoint, mais les militaires israéliens sont là, cachés à quelques mètres de l’axe, et on sait très bien qu’il faut rester sur la route. Si on la quitte d’un seul mètre, les Israéliens tirent sans sommation. Une fois arrivées dans les faubourgs de Gaza, au rond-point Naboulsi ou au rond-point Sabaatach, les marchandises sont déchargées et récupérées par des commerçants qui les vendront sur les marchés qui restent.

Dans cette cage, on ne meurt pas encore de faim, mais la malnutrition devient une réalité. On peut encore trouver quelques légumes, des concombres, des tomates, parfois des laitues, des oignons, quelques courgettes. Ces légumes sont rares et chers, à cause notamment de la difficulté de leur acheminement. Il reste, au moment où j’écris, une seule route qui relie le sud au nord : la route Al-Rachid, qui longe la Méditerranée. Elle est interdite aux voitures et aux motos, il faut la parcourir à pied ou en charrette tirée par un âne. Pas de checkpoint, mais les militaires israéliens sont là, cachés à quelques mètres de l’axe, et on sait très bien qu’il faut rester sur la route. Si on la quitte d’un seul mètre, les Israéliens tirent sans sommation. Une fois arrivées dans les faubourgs de Gaza, au rond-point Naboulsi ou au rond-point Sabaatach, les marchandises sont déchargées et récupérées par des commerçants qui les vendront sur les marchés qui restent.

L’armée israélienne bombarde des points de distribution de nourriture

Nous avons réduit notre alimentation à un petit-déjeuner et un repas par jour. Beaucoup de gens n’ont pas les moyens comme nous de s’offrir un petit-déjeuner. Celui-ci consiste en tartines frottées de zaatar (du thym broyé mélangé avec des graines de sésame) avec un peu d’huile d’olive si on en trouve, mais ça aussi, ça devient très cher. Comme toutes les boulangeries ont fermé, nous fabriquons notre pain nous-mêmes, à prix d’or, car le sac de farine est passé de 30 à 500, voire 600 shekels (150 euros). Mais il n’y a ni gaz ni fuel, donc on fait le pain et la cuisine au feu de bois, dans notre immeuble, sur le palier. Tous nos voisins font pareil. On achète le bois à 15 shekels le kilo (environ 4 euros), et il en faut bien trois kilos par repas. On prend un autre repas quand je rentre du travail, vers 6 ou 7 heures du soir : des lentilles, de la frikeh (blé vert grillé) ou du riz, parfois accompagné de haricots verts ou d’autres légumes en conserve, ou du thon en boîte. Lire La Suite ICI

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