Les interventions sécuritaro-humanitaires de la France en Afrique, un paradoxe !

Pendant des années, le penchant de la France pour la reddition a été une plaisanterie courante aux États-Unis. En 2011, la France a joué un rôle de premier plan dans la campagne visant à chasser du pouvoir le dirigeant libyen Mouammar al-Kadhafi. En fait, la France d’après-guerre a rarement eu de sérieux scrupules à recourir à la force à l’étranger. L’histoire coloniale de la France colore encore sa stratégie militaire d’une manière que la rhétorique française tend désormais à obscurcir.

Certes, les raisons d’intervention de la France ont changé au fil des ans. Lorsque la France a envoyé des parachutistes pour sauver le président autocratique gabonais Léon Mba d’une tentative de coup d’État en 1964, le président français Charles de Gaulle n’a pas eu recours à une rhétorique de haut vol sur les droits de l’homme. Ses porte-parole ont évoqué les obligations conventionnelles de la France envers le Gabon et la nécessité de protéger les citoyens français dans le pays. Des observateurs plus cyniques ont rapidement noté l’importante participation de la France dans les réserves pétrochimiques du Gabon – et l’intérêt financier direct de certains des proches de De Gaulle dans l’entreprise. Les Africains eux-mêmes ont accusé la France de néocolonialisme. Le journal West African Pilot a affirmé que la France, malgré une cession apparente du pouvoir, était «toujours le véritable maître dans certains États africains».

Elf Aquitaine

En 1985 encore, grâce en grande partie aux activités du conglomérat énergétique français Elf Aquitaine, la France comptait 26 000 citoyens au Gabon – plus que pendant la période coloniale elle-même. En effet, la France a réussi, à certains égards, à étendre tranquillement son rôle en Afrique dans les décennies qui ont suivi la décolonisation, notamment avec ses interventions militaires dans des pays qui n’avaient même pas appartenu à l’empire colonial français, comme la République démocratique du Congo . Au moment de la dernière intervention de la France en République centrafricaine, la rhétorique de Paris avait quelque peu changé. Jean-Bédel Bokassa, que la France avait largement soutenu après avoir pris le pouvoir lors d’un coup d’État en 1966, était devenu un embarras pour ses mécènes.

En outre, la France a intérêt à maîtriser Kadhafi, qui s’efforce d’étendre son influence dans la région, y compris en République centrafricaine, depuis qu’il a pris le contrôle de la Libye au début de cette décennie. Cette compétition avec Kadhafi se poursuivra pendant des années, notamment au Tchad, où la France a organisé une intervention particulièrement importante contre les rebelles soutenus par la Libye en 1983 et 1984. Il est impossible de comprendre la participation enthousiaste de la France au renversement de Kadhafi en 2011 en dehors du contexte de cette compétition.

religion et sa culture

La France a toujours des intérêts stratégiques et économiques importants en Afrique. L’Afrique reste un marché important pour les produits manufacturés français, et jusqu’à 240000 citoyens français vivent sur le continent. Et même si l’apogée de l’activité missionnaire française en Afrique est révolue depuis longtemps, la France a conservé une affinité pour les groupes africains qui ont embrassé sa religion et sa culture. La France a surtout eu tendance à soutenir les chrétiens dans les conflits le long de la frontière sud poreuse de l’Islam sur le continent.

Le public français a une longue histoire de soutien à ces opérations militaires. À l’époque de De Gaulle, ils étaient perçus comme le signe que la France, malgré sa défaite pendant la Seconde Guerre mondiale et la perte de son empire, conservait le statut de grande puissance. Aujourd’hui, le soutien est également lié à la fierté que la France puisse prendre la tête de la défense des principes humanitaires. Il est utile que les opérations aient été pour la plupart à petite échelle, impliquant généralement quelques milliers de soldats au maximum, avec peu de risques de pertes importantes pour les Français.

Nouvelle génération africaine et difficulté pour la France d’échapper à son passé africain

Aujourd’hui, Emmanuel Macron reste parfaitement conscient des difficultés de séparation des intérêts français et humanitaires en Afrique. «.

Malgré cela, il a été difficile pour la France d’échapper à son passé africain. Fin décembre 2013, des milliers de membres du mouvement rebelle musulman Séléka en République centrafricaine ont protesté contre l’intervention, accusant la France de ne pas être venue pour rétablir la paix mais pour réprimer la minorité musulmane du pays. On peut soutenir que si la France veut véritablement s’imposer comme leader des interventions purement humanitaires, elle devrait le faire ailleurs qu’en Afrique, où le passé pèse si lourd. Mais la tradition passée est contraignante à d’autres égards. Ainsi, dans un avenir prévisible, quels que soient les objectifs d’une opération donnée, la sphère d’action militaire effective de la France restera vraisemblablement ce qu’elle a été au cours des 130 dernières années: son ancien empire colonial. En ce sens, les récentes interventions de Hollande n’auguraient rien de nouveau – mis à part, peut-être, le statut accordé à la valeur militaire de la France par les Américains.

En ce premier semestre 2021, force est de constater qu’une nouvelle épreuve de forces s’engagent dans le pré-carre français contre la France, avec comme lame de fonds, une demande insistance de la nouvelle génération africaine de levée de la mainmise française dans leurs destinées.

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Alpha Waly Diallo est un spécialiste en Relations Internationales. Il a séjourné longtemps au Maroc et en Afrique du Sud. À Johburg il a même rencontré Madiba ... Diplômé D'Etudes Supérieures en Commerce et Administration des Entreprises (DESCAE), ce consultant et chercheur réputé est un habitué des sommets continentaux sur le développement, la démocratie et la gouvernance. Passionné de géopolitique, Alpha disséque pour Kirinapost les frémissements de la marche du monde. E-mail : alphawally@yahoo.com

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